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Aristophil dans les médias, le mal est fait... et le silence du SLAM

Amis Bibliophiles bonsoir,
 
Il ne se passe quasiment pas un jour sans qu'Aristophil ne soit mentionné dans les médias, c'est triste, et quoi qu'il advienne, le mal est fait, et il est quadruplement fait même.
 
Le mal est fait pour Aristophil qui aura du mal à se remettre de tout ce qui se passe en ce moment, quoi qu'il advienne. La confiance en effet est rompue. Quiconque se posera désormais la question d'investir dans ce type de produits financiers sera dissuadé en un clic sur Google.
 
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L'étonnant blason d'Aristophil
 
Le mal est fait pour les investisseurs, dont on sait encore s'ils pourront récupérer leurs investissements. Près de 18 000 foyers sont concernés (Source Gérard Lhéritier, Nice Matin) et je me mets parfois à leur place aujourd'hui: impossible de joindre Aristophil, site fermé, comme celui du Musée des Lettres et Manuscrits, d'ailleurs. Ca sent la fin de règne.
 
Le mal est fait pour les 70 salariés d'Aristophil et de ses diverses extensions, qui ne peuvent aujourd'hui être payés, tous les comptes, personnels ou professionnels de la société et de ses représentants, en France, en Belgique et au Luxembourg ayant été saisis (source Libération, 1er décembre 2014). Libération précise également que la société n'a pu clore son exercice 2013 qu'avec cinq mois de retard, et après que M. Lhéritier ait renfloué la société via 35 millions d'euros pris sur ses deniers personnels.
 
Le mal est fait, enfin et d'une certaine façon pour le marché du livre ancien et surtout pour son image: d'une part parce que je vois difficilement comment l'arrivée des plus de 135 000 livres et manuscrits concernés pourrait se faire sans conséquence pour le marché et ses prix.
 
Mais aussi, d'autre part, d'une façon un peu plus sournoise: des titres de presse nationaux  - et internationaux - se font aujourd'hui l'écho des déboires d'Aristophil et d'une façon ou d'une autre jettent le doute, si ce n'est l'opprobre, sur la probité de ce marché pour ceux qui le connaissent mal.
 
Ainsi, imaginons un particulier ayant un livre à vendre à un libraire par exemple, exposé à ce type de message dans la presse. Comment croyez-vous qu'il va réagir en réalisant que le montant proposé par le libraire est potentiellement x fois inférieur à la valeur de l'objet, cf. Cellulairement, acheté 300 000 euros chez Sotheby's, et revendu 1,5 million d'euros aux investisseurs d'Aristophil. Le doute est potentiellement semé sur l'ensemble de la chaîne. Parce que le doute est semé, à tort ou à raison, comment faire confiance à un expert ou un libraire. C'est dramatique.  
 
Imaginons un particulier acheteur cette fois-ci. Il est actuellement exposé à un ensemble d'informations qui jettent le doute sur l'ensemble de l'écosystème: dans chaque article sont cités les SVVs, certains libraires... et même des experts. A qui faire confiance dans ce cas? Et ce d'autant plus que lus rapidement, ces articles sèment également le doute sur le potentiel retour sur investissement d'une acquisition. Certains acheteurs se posent toujours la question de la revente à l'achat, mais d'autres plus simplement, et c'est logique, souhaitent quand même ne pas trop en perdre.
 
Aujourd'hui, à l'aune de ces articles, il est difficile pour le béotien de savoir trier le bon grain de l'ivraie. Cette histoire jette forcément un voile sur le marché, et c'est fort dommage à un moment où il aurait bien besoin de nouveaux entrants et où j'entends chaque jour des libraires se plaindre.
 
Je vous donne un autre exemple: à force de me voir recevoir des catalogues ou des ouvrages sur mon lieu de travail, mes collègues savent désormais peu ou prou que je suis bibliophile. Nous n'en parlions jamais vraiment, sauf depuis deux semaines, où plusieurs d'entre eux m'ont demandé si j'avais vu passé ces informations, et les mots qui reviennent le plus souvent sont arnaque, Ponzi, experts pourris, libraires complices... et moi en pigeon! :)
 
Il ne s'agît pas ici de jeter le bébé avec l'eau du bain, ou de faire un amalgame entre tous les experts et tous les libraires... mais comme l'a justement suggéré Benoît dans un commentaire, après un silence assourdissant et qui dure depuis plusieurs années, peut-être serait-il temps que le SLAM s'exprime, ou au moins réagisse.
 
C'est extrêmement délicat, c'est difficile, d'autant que certains membres du SLAM seront potentiellement concernés par les développements de l'histoire, mais c'est vital pour continuer à faire connaître et aimer le livre ancien. C'est le rôle d'un syndicat professionnel de s'exprimer sur ces sujets, de défendre ses membres et son industrie. Des amateurs ont forcément vendu ou acheté des livres via les acteurs cités, et je ne parle pas seulement d'Aristophil. Pour certains, il est vraisemblable que cela a un goût amer.
 
Du reste, quand on relit la définition du SLAM sur son site internet, une prise de position semble légitime. Comment un Syndicat professionnel pourrait-il être sourd à ce qui se passe?
 
Le Syndicat National de la Librairie Ancienne et Moderne (SLAM) créé en 1914, est l'une des plus importantes et anciennes Associations de libraires de livres anciens au monde, précédée seulement par l'Association Britannique le ABA fondé en 1906. Une de ses vocations est de faire connaître au public le monde du livre ancien.
 
Il est le seul représentant de la librairie ancienne en France. Ses interventions sont nombreuses tant auprès des pouvoirs publics qu'auprès des organismes privés et des libraires. Ses actions sont également nombreuses pour la promotion de la librairie et la connaissance du livre. Il regroupe près de 250 libraires, marchands d'autographes et d'estampes, dont la compétence et la probité sont attestées par des conditions d'admission difficiles. Tous vous garantissent :
 
- Compétence et connaissance
- L'authenticité des livres, manuscrits et autographes
- Honnêteté et professionnalisme
, et de bons rapports commerciaux partout à travers le monde.

Experts dans leurs domaines, ils assurent le maintien de la tradition bibliophilique et préparent la bibliophilie de demain. Ils sont le rouage essentiel de la connaissance et de la préservation du patrimoine. Ils vous conseillent dans vos achats ainsi que pour la valorisation ou la vente de votre bibliothèque. Leurs catalogues de vente sont également des outils bibliographiques précieux.
 
Les deux protagonistes professionnels cités dans les médias (et dont il faut respecter la présomption d'innocence), sont membres du SLAM, et là encore, de leur part comme de celle du Syndicat, pas de réaction?
 
Les mots clefs de cette affaire (Tracfin, Ponzi, expert, saisie, librairie perquisitionnée, Sade volé à la famille de Noailles et acquis par Aristophil, documents de De Gaulle réclamés par les Archives Nationales), avérés ou pas, jettent forcément un discrédit sur ce marché et une partie de ses acteurs. C'est très triste.
 
Le SLAM peut-il faire la sourde oreille (vous direz, les muets sont souvent sourds) comme il la fait depuis des années malgré quelques mises au point par Anne Lamort, qu'il faut saluer, ou doit-il nécessairement s'activer non pas pour condamner ce qui se passe, mais pour dans ces moments difficiles, redorer le blason du Livre Ancien?
 
Les moyens sont nombreux, et c'est ce qu'on attend d'un syndicat professionnel: campagne de publicité, lobbying, exposition, conférences, non pas sur le sujet mais sur celui qui nous passionne, le Livre. Non pas s'exprimer sur ce qui secoue le microcosme et même plus, mais justement ramener l'amour du livre à ses fondamentaux. En ce moment, c'est sans doute plus important que d'attribuer un prix de bibliographie.
 
H

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