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Channel: Le Blog du Bibliophile, des Bibliophiles, de la Bibliophilie et des Livres Anciens
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Exposition Bibliothèque Carlo de Poortere: un petit compte-rendu pré-vente

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Amis Bibliophiles bonsoir,
 
Ce que j'aime avec les ventes chez Sotheby's, c'est que j'ai juste à traverser la rue en sortant du bureau pour aller visiter l'exposition.
 
C'est d'ailleurs ce que je fis cet après-midi, et je vous livre ce soir quelques impressions, de façon décousue.
 
 
... Très belle bibliothèque évidemment, magnifiques ouvrages, de vrais raretés, un assortiment unique d'almanachs en petits formats (veau, veau blanc, maroquin, broderie, micas, papier peint, tout y est, dans de petites boîtes, c'est très impressionnant), un assortiment non moins étonnant de grands formats. Et quand je dis grand, je parle d'éléphant, de coffe table... pas pour moi, mais pour ceux pour qui la taille compte, vous trouverez de quoi vous rassurez (Naturellement, ça coûte un peu plus cher qu'un psy... encore que...).
 
... Ce qui est étonnant c'est que l'on peine à trouver une cohérence dans cet ensemble de très beaux ouvrages, entre Toulouse-Lautrec, Retz, Blaeu ou... Dorat. Cela m'a laissé une impression étrange, comme si finalement la personnalité de Carlo de Poortere ne s'attachait à aucun thème particulier. C'est d'ailleurs ce qu'explique Patrick de Poortere dans le préambule du catalogue...
 
... Une bizarrerie? L'ex libris de Carlo de Poortere que j'ai trouvé très étrange. D'une part il n'est pas à la hauteur des livres de l'amateur, ni en raffinement, ni même en qualité... et surtout, s'il est présent dans tous les exemplaires, il est exactement identique, et flambant neuf, dans chaque exemplaire. Comme s'il avait été apposé hier, et non au cours d'une longue carrière en bibliophilie. Deux hypothèses alors, il a été placé là par les héritiers du bibliophile pour laisser une trace, un hommage, dans ces ouvrages avant de les remettre en circulation, ou il est là pour ajouter une certaine forme de valeur à chaque ouvrage "Lignerolles, Bruas, De Poortere".
 
J'étais avec un ami bibliophile à la vente, cela nous a tous les deux surpris.
 
... Plus personnel, cet ami m'accusé de faire de lorticaire en passant trop de temps sur un Scarron, et j'ai pris conscience que je laisse des annotations très étranges dans les catalogues. Comment ne pas passer à la postérité, mais aussi comment déconcerter mes voisins qui lorgnent évidemment sur mes notes pendant les ventes avant de leur porter l'estocade :)
 


 
Le Choderlos: Mon Dieu, il est tout piqué :)
 
Résultat des courses: je serai devant mon écran pendant la vente, le clic léger, avec quand même une belle liste de lots sur lesquels tenter ma chance...
 
 
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Connaissance de la reliure: la ciselure des tranches dorées

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Amis Bibliophiles bonjour,

La ciselure des tranches dorées des livres apparaît à la fin du Moyen Âge. Ce type de décor  assez rare, connaît sa plus large utilisation au milieu du XVIe siècle.
 
Reliure parisienne signée Jean Norvins, 1523, catalogue Berès, six siècles de reliures
 La ciselure des tranches se pratique sur une tranche préalablement dorée. On utilise un poinçon, un petit burin, un filet ou un fer géométrique  qui est percuté sur la tranche serrée dans un étau, une presse ou un outil qui en tient lieu. La juxtaposition des empreintes suit le dessin, souvent constitué de minuscules petits points. On a retrouvé sur des forts volumes les traces d’épingles ayant servi à maintenir le modèle dessiné.
 
Reliures de l'atelier de Fontainebleau 1545, à gauche chiffre du roi dans un écu, à droite double F
Cette ornementation en creux peut reprendre les motifs frappés à froid sur les plats de l’époque.
 
Cette technique apporte cependant le désavantage de denteler le bord des feuillets.
 
Les livres sont habituellement ciselés sur dorure sur leurs trois tranches.
 
Reliures royales de la Renaissance
Le décor réalise des rinceaux, des fleurs, des chaînettes, des fleurons à l’antique. Au milieu du XVIe, le dessin de la ciselure affectionne un motif mis à la mode dans les encadrements des gravures des livres d’heures de Geofroy Tory ou dans son Champfleury et dit « à l’antique » car inspiré des rinceaux de l’antiquité. Ainsi appelle-t-on parfois les tranches ciselées des tranches antiquées.
 
On explique que le souci de réaliser  des tranches ciselées,  assurément  coûteuses et prenant beaucoup de temps, se justifiait par l’habitude encore vive de ranger les livres à plat.
 
Ce décor, luxueux par excellence, contraste parfois avec la sobriété de la couvrure. Aussi n’est-il pas impossible que des ouvrages originellement reliés en étoffe aient vu très tôt leurs reliures fragiles remplacées.
 
Tranches ciselées de haut en bas  livres de 1534, 1547, 1535.
Les reliures de la librairiede Fontainebleau, c’est à dire de la bibliothèque du roi, installée à Fontainebleau de 1544 à 1570 offrent un bel ensemble de tranches ciselées. Les décors tracés au poinçon, forment des réseaux réticulés, des vases, des arabesques mais aussi parfois le chiffre du roi. Sous Henri II, l’atelier de Fontainebleau pérennise l’usage de ce type de décor à la mode sous François 1er.
 
Tranches ciselées 1534, 1547.
 
Marie-Pierre Lafitte et Fabienne Le Bars les présentent en détails dans l’ouvrage paru en 1999, « reliures royales à la Renaissance, la librairie de Fontainebleau ». Elles regrettent que « la relative rareté des tranches ciselées en France… explique sans doute la minceur de la littérature sur le sujet, tout comme l’absence de vocabulaire fixé. »
 
Aussi ne sait-on pas précisément qui  de l’artisan doreur, relieur ou ciseleur, réalisait ce travail dans les ateliers.
Reliure de Gruel, librairie Daniel Bayard
 
Bien que ne disparaissant pas totalement après le XVIe siècle, Macé Ruette l’utilise magistralement, la ciselure des tranches ne revient véritablement à l’honneur qu’au XIXe siècle avec la vogue historiciste. Si de grands noms de la reliure (Lortic, Trautz-Bauzonnet, Cuzin, Capé, etc) en exécutent pour leurs clients bibliophiles,  les relieurs  de livres de piété  en usent largement. L’admirable Gruel par exemple maîtrise la technique.
 
Lauverjat

Ebayana et Bibliophilie, livres anciens en vente sur ebay: belles reliures, EO, livres à planches, éditions du 16ème au 20ème siècle et curiosités

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Amis Bibliophiles bonjour,

Voici une sélection de livres intéressants actuellement en vente sur eBay.

Vous pouvez en retrouver beaucoup plus sur http://encheresbibliophiles.fr/


En passant, j'ai ajouté de nouvelles catégories sur http://encheresbibliophiles.fr/, si vous aimez la philatélie, le militaria, la numismatique ou les antiquités en général, vous pourrez retrouver sur le site les objets de ces catégories toujours classés par critères: les plus suivis, les plus chers, les plus enchéris.
 


UNIQUE - HIST NATURELLE DE BUFFON - 1766 - IN QUARTO - 209 PLANCHES COULEURS
 

 

 

 



 
 
 

 
 

 

 

 



 

 

 
 

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Connaissance de la reliure: protection et enrichissement des livres brochés

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Amis Bibliophiles bonsoir,
 
 
A notre époque où, devant l'invasion barbare des technologies, on est tenté de "cultiver l'authentique", deux positions se dégagent en bibliophilie :

- les livres en état "traditionnel", c'est à dire reliés, de préférence à l'époque de parution, ou revêtus des somptueux vêtements du XIXe  

- les livres tels que parus, dans leur couverture  imprimée d'édition ou dans un cartonnage d'attente pour les anciens.

Ces deux tendances sont, à mon sentiment, également louables, même si la seconde paraît d'un abord plus difficile. Il existe cependant des solutions susceptibles de rapprocher les deux.

Les belles et riches reliures sont souvent protégées dans de luxueux étuis ou coffrets : pourquoi ne pas se tourner vers le même type de protection pour les livres brochés.

C'est, à mon sens, la solution parfaite pour habiller ce genre d'exemplaires sans attenter à leur intégrité tout en se réservant la possibilité de changer à son gré, si le résultat n'est pas satisfaisant.

La réalisation d'une boîte est une opération digne d'un parfait relieur. Comme je pratique moi-même la reliure en modeste amateur, je peux témoigner qu'il s'agit bien d'un travail fort délicat que je ne réserve qu'à des cas particuliers.

Pour des volumes moins importants, pour lesquels je souhaite me faciliter la vie, j'opte depuis quelque temps pour une chemise en carton mince, à la fois décor et protection, que l'on peut considérer comme ce qu'on appelait autrefois une "liseuse" et qui confère d'ailleurs à l'ouvrage une "lisibilité" plus aisée. C'est beaucoup plus facile et plus rapide à réaliser qu'un coffret.

Il n'empêche que l'on peut bien sûr ajouter un coffret de protection richement décoré si l'ouvrage le mérite.

Quant à l'exécution, les photos qui suivent dispensent de toute explication.

Une remarque cependant : pour éviter que le livre ne tombe, je glisse le second plat derrière une "bretelle" en papier résistant : papier peau d'éléphant par exemple - de plus en plus difficile à trouver, mais que l'on pourrait remplacer avantageusement par du Tyvek.

 
 
 
Connaissance des Tems - 1827,  dans sa couverture d'attente de papier bleu.
Plats et dos recouverts de papier éléphant bleu, contre-plats de papier flammé bleu.
 
 
Traité de la Chaleur de Rumford - Firmin Didot 1804, dans sa couverture d'attente de papier bleu.
Dos et mors en papier éléphant, plats recouverts de papier Ingres bleu, contre-plats de papier flammé bleu.
 


Les atomesde Jean Perrin - Alcan 1913, dans sa couverture d'édition
Dos et plats recouverts de papier Ingres havane, contre-plats de papier flammé brun.


 


L'art d'assassiner les Rois (tout un programme) - Thomas Fullher 1696, dans son cartonnage d'époque recouvert de papier tiré à la colle, brun foncé.
Dos et plats recouverts de papier marbré multicolore.
 
Cinq prières dans la Cathédrale de Chartres par Charles Peguy
Images de Nathalie Parain
Gallimard NRF - 1950  dans sa couverture d'édition.
Dos de toile beige, plats recouverts de papier à la colle, étiquette en fac-similé.
 
Fables de La Fontaine - Publications des Laboratoires BOUILLET  1937
Dos en toile beige, plats en papier jaspé à la colle.
Le livre, composé de cahiers non reliés, est maintenu par un gousset en papier éléphant.
René de BLC

Ebayana et Bibliophilie, livres anciens en vente sur ebay: belles reliures, EO, livres à planches, éditions du 16ème au 20ème siècle et curiosités

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Amis Bibliophiles bonjour,

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En passant, j'ai ajouté de nouvelles catégories sur http://encheresbibliophiles.fr/, si vous aimez la philatélie, le militaria, la numismatique ou les antiquités en général, vous pourrez retrouver sur le site les objets de ces catégories toujours classés par critères: les plus suivis, les plus chers, les plus enchéris.


Sebastien Mercier L AN 2440 REVE S IL EN FUT JAMAIS gravures 3/3 reliures 1801


+++ SOMPTUEUX ! PLEIN MAROQUIN ROUGE à la FANFARE, Aux ARMES de LOUIS XV +++

SOMPTUEUX + LIVRE Prières AUTOGRAPHE + 1791 + 14 PEINTURES, Or + PLEIN MAROQUIN


ETIENNE DINET MIRAGES PIAZZA 1/40 EX N° SUR JAPON PLEIN MAROQUIN SIGNE NOULHAC



EDMOND ROSTAND CYRANO EXEMPLAIRE UNIQUE 50 DESSINS ORIGINAUX AQUARELLES 1899

RELIURE PASDELOUP AUX ARMES DUC D'AUMONT REVOLUTION DU PORTUGAL 1728 LOUIS XV

1741 - Cyrano de Bergerac - Voyage dans la Lune Etc. - COMPLET de ses 3 Volumes

‎MONTIFAUD, ‎Les Nouvelles Drolatiques, 1,2,3, reliure aux armes, CURIOSA

UNIQUE - HIST NATURELLE DE BUFFON - 1766 - IN QUARTO - 209 PLANCHES COULEURS


1659 - LES ESSAIS DE MONTAIGNE - 1 PORTRAIT - 3 VOL COMPLETS - MAROQUIN

1882 CURIOSA BREVIAIRE DE L'AMOUR EXPERIMENTAL 1/50 PAPIER CHINE BIBLIOPHILIE

1882 BIBLIOPHILIE MAROQUIN DOUBLE SIGNE GARIDEL HURTREL CAUMONT LA FORCE AMOURS



RARE ++++ 1545 BIBLIA Ex officina Roberti Stephani (Robert ESTIENNE) complet

De la Demonomanie des Sorciers par I. Bodin 1582 Sorcellerie Esotérisme


Très ancien Livre probablement XVIème curieuses illustrations Esotérisme Science

BIBLIOPHILIE - RELIURE MAROQUIN LORTIC - THEOPHILE GAUTHIER MLLE de MAUPIN 1883


BIBLIOTHEQUE HENRI BERALDI ++ 5 VOLUMES, dont les PLANCHES + 1934 + BIBLIOPHILIE

CURIOSA-Monuments de la vie privée des 12 Césars-Rome 1786-50 illustrations-

OEUVRES BADINES D'ALEXIS PIRON -1797- CURIOSA EROTICA GRAVURES EROTIQUES


L’Heptaméron de Marguerite de Navarre , 1615

Clément MAROT 1550 Beau maroquin du XVIIe

BIBLIOPHILIE ++ BIBLIOGRAPHIE de BURE ++ 1763-1768 ++ 7 VOLUMES in8 ++ SUPERBE

1893 O. UZANNE BIBLIOPHILIE BOUQUINISTE ET BOUQUINEURS QUAIS DE PARIS 1/25 CHINE



1898 BIBLIOPHILIE A. FRANCE LECON BIEN APPRISE LEBEGUE UZANNE MAROQUIN MEUNIER

REUSNER, Icones sive Imagines virorum literis illustrium. Edition originale 1587

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Beaux exemplaires en maroquin autour du courant matérialiste au 18ème siècle: Spinosa, Fréret, Mirabaud, Meslier, Holbach...

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Amis Bibliophiles bonjour,
 
Je vous propose de découvrir aujourd’hui  une sélection de livres de ma bibliothèque sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur : le courant matérialiste au 18ème siècle.

Tout d’abord, il me semble bon de préciser que ce petit article n’a aucune prétention pédagogique : je n’ai ni le désir, ni les compétences,  de vous prodiguer un cours de philosophie sur le sujet !
 
Il s’agit davantage de vous présenter quelques ouvrages remarquables de la pensée humaine , que le hasard (et une recherche assidue!) ont bien voulu mettre sur ma route. Pour le plaisir des yeux, j’ai ajouté également quelques reproductions d’exemplaires passés sur le marché qui m’avaient fait les yeux doux.
 
Au coeur de toute réflexion philosophique , il y a deux questions qui reviennent et hantent l’Homme depuis toujours :
- son âme survivra -t’elle au séjour terrestre  dont la fin est inéluctable?
- qui/quoi a créé ce monde qui l’entoure et qui l’émerveille chaque jour un peu plus?

Pour trouver une réponse et se rassurer, l’Homme a inventé la religion. Et puisque la nature du Dieu inventé répondait aux ultimes interrogations, il n’était plus nécessaire de chercher ailleurs : l’Homme s’est trouvé intellectuellement prisonnier de ce qu’il avait créé.

Simultanément, le pouvoir politique s’appuyait sur la religion (les Rois ne sont-ils pas de droit divin, quand ils ne sont pas des Dieux vivants?!) et muselait les ardeurs d’émancipation.
 
S’écarter de la religion, c’était remettre en cause le pouvoir.

Inutile de dire qu’il fallut un petit moment à nos sociétés, pour exposer librement certaines idées, et pouvoir philosopher tout simplement!
 
On peut citer tout d’abord certains  philosophes grecs ou romains comme Lucrèce et Epicure, précurseurs de l’athéisme.
Par la suite, dans nos sociétés occidentales , il fallut attendre la Renaissance pour entendre la voix de certains osant mettre en doute la sacro-sainte parole de l’Eglise.
Deux auteurs majeurs, tous deux morts dans les flammes du bucher :
 
Lucialio Vanini :
Amphitheatrum aeternae Providentiae Divino-Magicum, 1615
- De Admirandis Naturae Reginae Deaeque Mortalium Arcanis, 1616.
 
Il y a actuellement chez un libraire parisien un joli exemplaire relié en maroquin par Derôme le jeune du deuxième ouvrage.
Malheureusement, à ma connaissance, il n’y a pas de traduction française ancienne de ces deux ouvrages.
 
Giordano Bruno :
- Spaccio de la Bestia Trionfante (L'expulsion de la bête triomphante), 1584
- La Cena de le Ceneri (Le Banquet des Cendres), 1584
 
On peut citer deux exemplaires restés célèbres de ces livres :
 - reliés en deux volumes provenant de La Valliere/Marquis de Mejannes en maroquin mosaïqué de Derôme que l’on peut voir ici : 
 - celui (relié en un volume) de Mac Carthy Reagh en maroquin mosaïqué et doublé! 

A noter qu’il y a une traduction d’un partie de Spaccio de la Bestia Trionfante qui est paru en 1750 sous le titre « Le Ciel Réformé ».
Un exemplaire en maroquin d’époque serait enviable…
 
Au 17e, s’ouvre une nouvelle ère tournée vers une vision scientifique de la gymnastique intellectuelle,  avec deux auteurs : Descartes et Spinoza.
N’ayant pas trouvé d’exemplaire en maroquin d’époque d’un « Discours de la Méthode » 1637 (humour bien sûr!), je me contenterais de vous montrer un joli exemplaire de « Reflexions curieuses d’un esprit désintéressé… » 1678 avec le second titre « Traité des cérémonies des juifs »… », et le complément « Réfutation des erreurs de Spinoza » 1731, deux volumes in-12 en maroquin rouge dans le style de Derôme. Exemplaire Abdy. 
 

Mais venons en au coeur de notre sujet : la matérialisme  du « siècle des lumières ».

Aboutissement de la révolte contre joug de l’oppression de l’Eglise et du pouvoir royale, le courant matérialiste est composé d’une multitude de textes radicaux, véritable berceau de la révolution française.
 
On peut citer, sans être exhaustif (il faut bien qu’il me reste deux/trois titres à chercher quand même!), et sans entrer dans les détails des attributions :
 
Freret « Lettre de Thrasibule à Leucippe » 1768, in-12 en maroquin rouge d’époque.
"ces exemplaires se vendaient sous le manteau et se louaient. Il fallait parfois payer deux louis pour emprunter la Lettre de Trasibule " ( M. James -Bûcher )



 

Collins« Libertés de penser » 1766 en 2 vol in-12 en maroquin d’époque.
Ce livre a comme but "de ne point donner une aveugle crédulité à ces mystères qu’on ne saurait trop approfondir » lit-on dans l’avertissement.
 

 
Toussaint« les Moeurs » 1748, in-12 en maroquin rouge d’époque. Exemplaire Charles Cousin dit le "Le Toqué ».
Je cherche le tirage in-4…
 
Le livre fut jugé par la Cour du Parlement de Paris comme «contraire aux bonnes mœurs, scandaleux, impie et blasphématoire » car « le but qu'on s'y propose est d'établir la Religion naturelle sur les ruines de tout culte extérieur et d'affranchir l'homme des lois divines et humaines, pour les soumettre uniquement à ses propres lumières» (ms. Anisson Duperron, 22092, f° 125-126). (dictionnaire des journaliste en ligne)
 
 

Mirabaud« Le Monde, son origine et son antiquité » 1751 in-12 en maroquin vert olive d’époque.
 
"L’entreprise de Mirabaud parait d’une cohérence exemplaire, par sa méthode et par la fin systématique qu’elle poursuit. Elle résume un aspect essentiel de la pensée matérialiste du début du XVIIIème siècle" (Olivier Bloch, Le Matérialisme du XVIIIème siècle et la littérature clandestine)



Et cinq auteurs majeurs :
 
Le Curé Meslier :
Premier philosophe véritablement athéisme, il est l’auteur d’un seul livre.
Laissant à sa mort trois ou quatre copies manuscrites de son « Testament », il ne sera pas publié avant 1864!
Son oeuvre circule uniquement sous forme manuscrite durant le 18e.
On se met à rêver quand on trouve dans:
 
- le catalogue de Renouard en 1854 :
 

- celui de Chardin en 1823 :
 
Inutile de dire que ces manuscrits sont pour la plupart, dans les collections publiques.
Véritables merles blancs du bibliophile de nos jours!
 
Pour la beauté de l’exemplaire en maroquin doublé, on restera émerveillé en « feuilletant » sur Gallica :
 
 
Précision utile à apporter :  l’ouvrage écrit par Voltaire « Testament de J. Meslier", et édité par ses soins en 1762, trahit et dénature véritablement la pensée du Curé Meslier.
 
La Mettrie :
Médecin philosophe, il laisse une oeuvre tournée vers le plaisir.
Ayant succombé à une indigestion de pâté de faisan, il sut se donner une fin de vie pleinement en accord avec sa pensée!
 

 
Exemplaire de « Oeuvres » 1774 3 vol-12 en maroquin rouge d’époque.
Je cherche toujours l’édition de 1753 in-4...

Holbach :
Auteur infatigable, contributeur à l’Encyclopédie (près de 400 notices scientifiques!), il est l’animateur d'un salon de libres penseurs où se retrouvent les esprits les plus brillants : Voltaire, Rousseau, Diderot, d’Alembert, Condorcet, Helvetius, Buffon, Naigeon, Grimm et tant d’autres, viennent y exposer leur idées novatrices.
Holbach est le véritable héritier de Jean Meslier. 


« Le Bon Sens » 1772 en maroquin rouge d'époque. Exemplaire Beres qui est passé à sa vente le 17/12/2007. Détail piquant : il provient de la compagnie de Jesus!
Voltaire écrira à propos de cet ouvrage : « un livre terrible! ».


 « L’Antiquité dévoilé par ses usages » 1766 in-4 en maroquin rouge d’époque.

Je n’ai pas encore trouvé un exemplaire de la «bible du matérialisme» , à savoir « Système de la nature» 1770. Néanmoins, pour mémoire, je ne peux m’empêcher de décrire deux exemplaires remarquables de ce livre majeur :

- l’exemplaire du Duc de Luynes qui est passé il y a quelques années chez Sourget, et dernièrement à la librairie Jammes.
Il est en maroquin vert aux armes de Luynes et est complet des 16 pages du discours préliminaire qui a été imprimé seulement à 25 exemplaires. Exemplaire vraiment magnifique (mais un peu en dehors de mes possibilités financières malheureusement)!
 

- l’exemplaire Jean Bonna en maroquin rouge aux armes de la Adélaïde.
Détail amusant : les armes royales avaient été recouvertes d’une pièce de maroquin avec d’autres armoiries. La provenance royale n’a été révélée que récemment. Un provenance incroyable pour un tel livre!
 

Helvetius :
Fermier Général fortuné, il considère la croyance en Dieu comme notre incapacité à appréhender les lois de la nature, et place l’instruction au dessus de tout.


 
"De l’Esprit » 1758, in-4 en maroquin rouge d’époque. Tirage E1B en grand papier (voir Smith), avec les condamnations reliées à la fin. Je ne connais pas d’exemplaire en maroquin du tirage E1A…
Récemment s’est vendu un exemplaire remarquable en maroquin citron d’un tirage E1B avec toutes les feuilles censurées du tirage E1A, et la dédicace manuscrite de l’auteur. On ne peut rêver mieux...
 


« De l’Homme » 1773, deux vol in-8 en maroquin vert d’époque dans le style de Derôme le Jeune.

On lui attribue également un ouvrage intitulé :
«  Le vrai sens du système de de la Nature » 1774.
L’exemplaire est en maroquin citron avec un dos à la grotesque. Il est relié avec une édition de « Le bon Sens » de 1774. Il provient de la librairie Beres, catalogue 79 « Belles lettres au siècle des lumières » n°60, et par la suite de la collection Ortiz Patino (catalogue de vente du 21/04/1998  lot 125).
 


Et enfin Diderot :
C’est le parent pauvre de ma bibliothèque à vrai dire, mais je cherche, je cherche...
"Pensées philosophiques" 1757  in-16 en maroquin rouge d’époque.
Pour le moment je n’ai trouvé qu’un exemplaire d’une réimpression mais des exemplaires de l’EO passent régulièrement...



Pour finir, je vous montre deux exemplaires remarquables des « Oeuvres » éditées en 1798 qui sont passés récemment en vente.

Si d’aventure un lecteur avait un exemplaire sympathique de cette édition et voulait s’en dessaisir, sachez que je suis ouvert à toute proposition :)





J’ai bien conscience que ce très court tour d’horizon de la question matérialiste reste perfectible : la description des idées et des exemplaires est parfois un peu rapide!

Aussi, si le sujet vous intéresse, vous pouvez consulter :

- Michel Onfray « Les ultras des Lumières » : le sujet y est vraiment clairement exposé!
- Olivier Bloch « La Matérialisme du XVIIIe et la littérature clandestine » 

Il existe également une collection « La Lettre Clandestine » chez Classic Garnier, avec de nombreux numéros édités, et des sujets très pointus.
 
Au fait, avez vous des exemplaires que vous feriez partager?
 
Bonne lecture à tous!
 
Wolfi

Les différents types de reliure: la reliure dite "plein or"

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Amis Bibliophiles bonjour,

Je vous invite aujourd'hui à découvrir un type de reliure très particulier, les reliures plein or. Très rares, caractéristiques des grands relieurs du 17ème siècle, elles furent parfois copiées par d'autres grands relieurs du 19ème pour réaliser des reliures pastiches.

Selon la terminologie de Pascal Ract-Madoux et Isabelle de Conihout (catalogue "Relieurs français du 17ème, chefs d'oeuvre du musée Condé") qui ont étudié les exemplaires du Duc d'Aumale, ces reliures sont dessinées aux petits fers, souvent filigranés. Une terminologie légèrement différente de celle que l'on peut trouver dans les "Connaissances nécessaires à un bibliophile" d'Edouard Rouveyre, pour lequel le terme de "plein or" désigne "les fers de grandes dimensions que l'on pousse par estampage d'un seul coup sur les plats des livres pour obtenir un dessin complet", les plaques donc, d'une certaine façon. Cette définition rejoint d'ailleurs celle de Bertrand (Descriptions des arts et métiers, 1776).

Le risque avec les définitions de Bertrand et Rouveyre est justement cette confusion possible avec les reliures ayant bénéficié d'une dorure à la plaque, et leur terminologie englobe à mon sens trop de possibilités, des plaques de Dubuisson à celles inombrables, utilisées par les relieurs du 19ème. Plus que dans la façon d'appliquer le fer (de façon globale ou séparée), il me semble que c'est l'emploi de petits fers qui donne tout son intérêt au terme « plein or ». La reliure plein or pouvant d'ailleurs dans certains cas être également une reliure à la fanfare.

Selon Pascal Ract-Madoux et Isabelle de Conihout ces reliures sont rares au 17ème et le plein or peut-être appliqué soit sur le plat, soit sur les doublures.

Pour mieux comprendre, voici quelques reliures plein-or, puisque des images valent toujours mieux qu'un long discours.

Ici une reliure de Luc Antoine Boyet, vendue lors de la vente Wittock (2ème partie, 8 novembre 2004):
TERENCE (Publius Terentius Afer, 185-159 av. J.-C.). Comoediae sex ex recensione Heinsiana.Leyde: Elzevier, 1635.
In-12 (120 x 65 mm). Texte imprimé en rouge et noir. Titre gravé sur cuivre Cornel. Cl. Dusend, portrait de l'auteur gravé sur bois dans le texte.
RELIURE doublée DE LUC-ANTOINE BOYET: maroquin olive janséniste, dos à nerfs orné à froid, doublure en maroquin rouge, richement ornée et dorée dite "plein or" de petits fers pointillés, couronne fermée et lion hissant, emblème au centre, tranches dorées sur marbrure, (coiffes restaurées). Musea Nostra, p. 42.

PROVENANCE: Eglise Saint-Julien à Paris (note manuscrite sur le titre) -- Françoise d'Aubigné, marquise de Maintenon (son emblème sur les doublures) -- F.Eug. du Camp (note du XVIIIe siècle sur la garde) -- Henri Beraldi (ex-libris), vente I à Paris, 29 mai-1er juin 1934, lot 75 -- John Roland Abbey (ex-libris), vente I à Londres, 21-23 juin 1965, lot 650 -- Raphaël Esmerian (ex-libris), vente II à Paris 8 décembre 1972, lot 51.
La tradition attribue les quelques volumes ornés d'un médaillon composé de fers, mêlant le "lion des Aubigné" au soleil couronné, à madame de Maintenon (voir Olivier 1837, fer 10): par exemple, le Strada de 1553 dans la vente De Bry 1996 (lot 196, pl. LII) et un recueil manuscrit de poésies dans la vente De Backer 1926 (première partie, lot 615), puis dans la vente Cortlandt Bishop 1948 (lot 128). Pascal Ract-Madoux nous a confirmé que l'on peut ranger ces reliures parmi les groupes de "reliures archaïsantes" exécutées entre 1690 et 1710 par le doreur de Boyet, identifiés par lui et Isabelle de Conihout dans le catalogue de l'exposition récente au musée Condé, Reliures françaises du XVIIe siècle (Chantilly, 2002). Cette reliure, bien que recouvrant un Térence en latin, peut donc se joindre au groupe 8 "plein or" (Conihout et Ract-Madoux, nos 42 et 43). 


Et un autre exemple, toujours de Boyet (source : http://cyclopaedia.org/1667/boyet.html) :

En passant et pour le plaisir des yeux, un sujet connexe: les gardes papier entièrement dorées: la reliure  n'est pas plein or, mais doublée de maroquin et la présence de gardes de papier entièrement dorées. L'ensemble est luxueux et l'effet doit être saisissant quand on ouvre l'ouvrage. Magnifique. Cela tombe bien, si cela vous tente, l'ouvrage sera mis aux enchères à Saint-Ouen sur Iton le 18 octobre:
n° 289 -  HORACE. Quinti Horatii Flacci Opera.. Londres, John Pine, 1... HORACE. Quinti Horatii Flacci Opera.. Londres, John Pine, 1733-1737, 2 tomes en un vol. in-8, maroquin olive, dos à nerfs ornés, pièces de titre fauves, large encadrement de double filet et guirlande dorés sur les plats avec pointes dhermine et demi- guirlandes en écoinçon, armes au centre, tranches dorées, contreplats doublés en maroquin rouge avec bordure de maroquin olive, dans les deux cas ornés de guirlandes dorées, gardes de papier doré (Padeloup le Jeune). Magnifique édition, entièrement g ravée sur cuivre, imprimée sur grand papier avec une abondante iconographie dont 8 planches. Exemplaire de premier tirage. Somptueux et précieux exemplaire en maroquin doublé, aux armes de Philippe-Laurent de Joubert, président de la Cour des Comptes.Est: 4000/4500€

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Miscellanées bibliophiles: le spectre de la déflation (ou de l'inflation?), Aristophil. O tempora, o mores.

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Amis Bibliophiles bonjour,
 
Hausse des prix, baisse de prix?
 
Je n'arrive plus à suivre. J'avais l'impression d'assister à une hausse globale des prix, tirée par les exemplaires les plus précieux, mais à écouter certains libraires, et après une discussion avec l'un des plus grands libraires parisiens, que l'on peut penser à l'abri de ce type de questions, il semblerait que le spectre de la déflation hante bien des esprits.
 
Techniquement, la déflation est un mouvement persistant des prix à la baisse, sous une longue période. La difficulté c'est que si en économie on peut suivre le prix de la baguette, du kilo de riz ou du litre de lait, il est plus délicat d'établir un cours des livres précieux.
 
Selon ce libraire très bien établi, une baisse des prix est inévitable et seule une catégorie d'ouvrages (sans surprise) échappera à la chute, les ouvrages d'exception mais surtout les grand textes et les éditions rares, en particulier des 16ème, 19ème et du début du 20ème siècle.
 
J'avais pour ma part l'impression que les prix montaient légèrement, mais d'une part j'entends de nombreux libraires faire part de leurs difficultés, que les ventes sur ebay (ce sont parfois les mêmes personnes) sont neurasthéniques et d'autre part les ventes en salles, sont aléatoires: les prix atteints lors de la dernière vente Sotheby's furent assez décevants, et cet après-midi encore, les prix de la vente Jean-Claude Carrière étaient plutôt faibles (un Rabelais / Duchat en plein maroquin 19ème certes, mais fort beau, pour 1000 euros tout rond. Il aurait fait plus sur ebay). La salle était déserte, et sur le Live, il semblait y avoir peu d'adversaires.
 
La tendance me semblait à la hausse, je l'entends à la baisse? Serait-elle tout simplement sélective? Votre avis?
 
Pendant ce temps, la cote d'Aristophil baisse un peu: selon plusieurs médias, les locaux de la société à Paris, de son Musée des lettres et du Manuscrit et de son Institut, mais aussi chez ses courtiers, à Lyon et Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes) ont été perquisitionnés par le parquet financier de Paris.
 
La librairie du libraire Jean-Claude Vrain semble également avoir été perquisitionnée. Lepoint.fr évoque également l'intérêt de la justice pour l'expert Thierry Bodin. L'affaire est complexe et les conséquences multiples, mais pour résumer la pensée des divers médias ayant relayé l'information, un système de Ponzi est évoqué. Espérons que nous verrons rapidement plus clair.


A ma connaissannce, aucune réaction de la part d'Aristophil pour l'instant. Le site d'Aristophil est d'ailleurs suspendu il me semble.

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Le bibliophile et écrivain Jérôme Doucet (1865 - 1957) et ses pseudonymes.

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Amis Bibliophiles bonsoir,
 
Jérôme Doucet est un acteur important du monde de l’édition au début du XXe siècle; grâce à ses relations privilégiées avec de nombreux artistes, occupant des postes importants auprès de plusieurs éditeurs, il intervient dans des revues littéraires et artistiques de luxe. A ce titre, il est amené à publier souvent, et son nom revient au sommaire de nombreuses publications, comme secrétaire de rédaction, directeur de la publication, préfacier, auteur.
 
Il joue ainsi un rôle important dans les publications d’art de ce temps: la Revue Illustrée, de la famille Baschet, le Gil Blas Illustré, la société «Le Livre et l’Estampe», puis «l’Art et les Artistes».
 
Dans ces différentes fonctions il est amené à publier, à publier beaucoup. Ses contributions régulières dans les périodiques en question regroupent des articles journalistiques (critiques d’art, revues de presse, comptes-rendus d’évènements plus ou moins mondains) et des publications plus littéraires, généralement illustrées, qui sont ensuite regroupées et éditées luxueusement, par la Revue ou par le biais d’un éditeur traditionnel, Ferroud notamment.
 
Les annonces de la Revue Illustrée pour l’année 1899 sont assez parlantes :
 
- les Princesses de Jean Lorrain, contes illustrés par Manuel Orazi,
 
- les contes de Doucet, illustrés par Alfred Garth-Jones,
 
- notre ami Pierrot, de Doucet, pantomimes illustrées par Louis Morin,
 
- le Rire de la Grande Armée, illustré par Carrey,
 
- la Chanson des Mois, de Doucet, illustré par Leloir.
 
Même si ce programme ne sera finalement pas respecté, il illustre bien la place prépondérante de Doucet: «notre ami Pierrot» et «la Chanson des Mois» comprennent chacun 12 contes, Garth Jones a illustré 13 histoires de Doucet.
 
Dans l’ «Almanach du Bibliophile pour 1901» de Pelletan, Clément-Janin chronique (assez férocement pour certains d’entre eux) 21 livres de luxe parus en 1900 et 1901. Parmi eux, trois livres de Doucet: les «Contes de la Fileuse», les «Contes de Haute-Lisse», tous deux illustrés par Alfred Garth-Jones, et «Trois Légendes, d’Or, d’Argent et de cuivre», illustré par Rochegrosse. Ces trois livres ont fait l’objet de prépublications dans la Revue Illustrée, sur 21 livraisons, de 1895 à 1905 (pour le dernier conte, l’«âme du Samovar», illustré par Rochegrosse).
 
Parallèlement à ces occupations «sérieuses», Jérôme Doucet s’adonne à une passion: l’écriture pour les enfants. Très tôt il donne de petites histoires, qui tiennent sur quelques pages. Elles sont illustrées, bien sûr, et éditées par les maisons spécialisées, Juven en particulier.
 
Ces différentes activités sont menées en parallèle, et un petit recensement, sans doute non exhaustif, donne une idée de son rythme de travail:
 
- de 1900 à 1909, 30 ouvrages portent la signature de Doucet, soit comme auteur, soit comme préfacier (4 fois).
 
Cette production importante ne regroupe pourtant pas la totalité de ses contributions.
 
En effet, très tôt Doucet a utilisé un pseudonyme, qu’il n’a pas eu beaucoup de mal à imaginer.
 
Jérôme Doucet est le fils de Théophile Doucet, «professeur de l’enseignement supérieur», qui s’adonnait aux plaisirs de la poésie, et publiait ses productions (souvent des sonnets, très à la mode à cette époque) dans les revues littéraires lyonnaises, où il avait commencé sa carrière, soit sous son nom, soit en utilisant le nom de sa ferme de Beaumont-le-Roger, où il était né: Montfrileux.
 
La première signature «Jérôme Doucet» dans un livre figure dans le recueil publié en hommage à Joséphin Soulary, imprimé en 1891 par Storck, à Lyon. Il s’agit d’un sonnet pastiche du plus célèbre sonnet de Joséphin Soulary, qui est dédié «A P. POUR SES ETRENNES », P. ici désignant son père, et moquant gentiment sa passion du sonnet.
 
Et ce n’est sans doute pas un hasard si la première «vraie» publication de Jérôme Doucet, en 1892, toujours chez Storck, deux années après la mort de son père, porte comme auteur «Jérôme DOUCET / de Montfrileux». Il ne faut sans doute pas y voir une fausse particule, mais plutôt un rappel discret de ce père admiré, un rappel de ses origines. La dédicace porte d’ailleurs «à la mémoire de mon père».
 
 
Jérôme Doucet, «Cure d’Amour», petit in-8, 42pages, imp. Storck, 1892.
 
 
Toujours est-il que Doucet se souviendra de ce pseudonyme, quand il augmentera son rythme de publication.
 
Doucet l’utilise pour la première fois en 1896, pour signer «Guerriers et Soldats», illustré par Caran d’Ache, publié par la «Société d’édition et de publications» (Juven).
 
 
Montfrilleux, «Guerriers et Soldats», illustré par Caran d’Ache, in4, 18 pages, librairie Félix Juven, sans date (1896).
 
Il le réutilisera alors régulièrement, notamment dans la Revue Illustrée, dont il est devenu le «Secrétaire de la Rédaction», ce qui lui permet de donner plusieurs contributions dans le même numéro…
 
Ce pseudonyme de Montfrileux connaîtra plusieurs variantes: Montfrileux seul, Jérôme de Montfrileux, F. de Montfrileux, ou encore J. de Montfrilleux.
 
Voici une petite recension de son utilisation :
 
- 1896: «Guerriers et Soldats», signé «Montfrilleux» (avec deux L), illustré par Caran d’Ache, Société d’édition et de Publications.
 
- 1903: «Monsieur Minns. Horace Sparkins», signé «F de Montfrileux» d’après Dickens, illustré par Harry Eliott, publié par «Le Livre et l’Estampe».
 
- 1903: «Le Livre des Masques», signé «Montfrileux», illustré par Jules Fontanez, publié par «Le Livre et l’Estampe».
 
- 1909: «Gentlemen» d’après Dickens, signé «J. de Montfrileux», illustré par Harry Eliott, chez Blaizot.
 
- 1913: «Mossieu Clown», signé «Montfrileux», illustré par Poussin, chez Delagrave.
 
- 1916: «Les deux Cartouche», signé «Montfrileux», illustré par Robida, chez Delagrave.
 

- 1923: «les parodies des grands chefs-d’œuvre», signé «J. de Montfrileux», illustré par Bébin, imprimerie Kapp.
 
 
- Date inconnue (vers 1905): «le Monologue de l’ours», signé «Montfrileux», illustré par Léonce Burret, publié par Boivin.
 
 
 
 
On ne discerne pas vraiment de logique évidente dans cette liste: des livres bon marché pour enfants y côtoient des publications de bibliophilie, à tirage limité. Du reste Doucet ne faisait pas mystère de ce pseudonyme, assez transparent.
 
 
 
Légende: Louis Morin, «la Revue des Quatre Saisons», 1900-1901, p. 158.
 
Mais il se trouve que Jérôme Doucet a utilisé un autre pseudonyme… Il nous donne lui-même des indices à ce sujet. En effet, parmi ses dernières publications, Jérôme Doucet glisse des allusions personnelles.
 
 
En 1936, il publie «Mademoiselle Graindsel», à la Bibliothèque Rose. Les personnages principaux, autour de la fillette, sont ses parents, Jacques de Pierrelée, capitaine de cavalerie, Josette de Montfrileux son épouse, et sa grand-mère, Delphine de Pierrelée.
 
Il faut ici se souvenir que la grand-mère de Jérôme Doucet s’appelait Delphine Baudesson de Richebourg, ainsi qu’il nous le rappelle lui-même dans la dédicace de son premier livre important, la «Chanson des Choses», et que Théophile Doucet était lui-même capitaine de cavalerie, avant de quitter l’armée et de devenir professeur.
 
 
 
Dédicace de «la Chanson des Choses», Henry-May, 1900.
 
 
Ce nom de Pierrelée n’est pas tout à fait inconnu, si on consulte notamment les sommaires de la Revue Illustrée, aux époques où Jérôme Doucet y travaille.
 
On trouve, sous la signature de Simon de Pierrelée, de nombreux articles, en tout point semblables à ceux que Doucet signe Montfrileux.
 
On trouve également des contes, illustrés par Harry Eliott, de la même veine que ceux produits par Doucet.
 
Certaines de ces contributions seront reprises en volume. Voici une liste sans doute non exhaustive des publications signées Pierrelée :
 
- 1903: introduction à «Gaspard de la Nuit», illustré par Jules Fontanez, signé «Simon de Pierrelée», publié par «Le Livre et l’Estampe».
 
- 1904: «Contes d’un loup de mer», illustré par Lubin de Beauvais, signé « Pierrelée », chez Juven.
 
- Non daté: «Le plus malin», illustré par Vimar, signé « Pierrelée », chez Boivin.
 
- Non daté: «L’automobile de Sidi Poussah», illustré par Le Bocain, signé « Pierrelée », chez Boivin.
 
- Non daté: «Chasses extraordinaires», illustré par Harry Eliott, chez Boivin (Société d’édition et de publications).
 
 
 
Pierrelée, «le plus malin», illustré par Vimar, in12, 12 pages, société d’édition et de Publications, 1909.
On retrouve dans cette liste des points communs avec Montfrileux… encore plus frappants si on la rapproche d’un (petit) extrait des publications signées Doucet dans ces années-là :
 
- 1903: «Princesses de Jade et de Jadis», illustré par Lorant-Heilbronn, publié par « Le Livre et l’Estampe »
 
- 1907: «Six belles histoires de chasse», illustré par Harry Eliott, publié par Blaizot
 
- 1908: «Six grosses bouffées de pipe», illustré par Harry Eliott, publié par Blaizot
 
Nb: Ces histoires illustrées par Harry Eliott, avaient été publiées auparavant par la Revue Illustrée, sous la signature de Simon de Pierrelée…
 
 
 
Page de titre de «Princesses de Jade et de Jadis», signé Doucet, illustré par Lorant-Heilbronn, grand in-4, «Le Livre et l’Estampe», 1903. 25 ex. sur japon ancien avec une aquarelle et une suite avant la lettre, 25 ex. sur japon impérial avec une suite avant la lettre, 300 ex. sur vélin d’Arches.
 
 
Doucet a publié la même année, quatre ouvrages, signés de trois noms différents, dans sa propre maison d’édition, «Le Livre et L’estampe». Sa collaboration avec Harry Eliott, sur les années 1903-1908, a produit sept livres, également signés des trois noms…
 
Pierrelée, comme Montfrileux, est un lieu-dit proche de Beaumont-le-Roger. Une branche de la famille Doucet y avait-elle ses origines ?
 
Comme pour Montfrileux, Jérôme Doucet n’a pas eu à chercher bien loin ce nouveau pseudonyme. En effet, son père avait utilisé ce nom, dans un conte, qui a été publié par « la Revue du Siècle », en 1896. Ce conte, signé Théophile Doucet, a pour héros un certain Simon de Pierrelée, fierté des éditions Lemerre.
 
Jérôme Doucet republiera ce conte en 1903, dans «Gil Blas Illustré». Cette fois-ci le héros s’appelle Charles Créol, et le conte est signé Simon de Pierrelée…
 
Reste un dernier cas, qui ne rentre qu’à peine dans ce cadre.
 
Jérôme Doucet a une activité reconnue, dans trois domaines: la critique d’art, les livres de luxe, et les livres pour enfants. Dans ces trois domaines ses publications sont de bonne tenue. Pas de gauloiserie chez lui…
 
Mais il y a tout de même une petite exception.
 
Pour une publication publicitaire, Doucet donnera en 1913 «Quelques estampes gracieuses et précieuses du XVIIIe siècle», qui reste de bon ton. Mais la même année il publie «peintres et graveurs libertins du XVIIIe siècle», qui a un propos moins académique, chez Méricant. Cette fois-ci le livre est signé «Gérôme Doucet»… Erreur de l’éditeur, assez peu probable, Doucet ayant déjà publié deux ouvrages dans cette maison les années précédentes, ou volonté de se cacher un peu?
 
 
Gérôme Doucet (sic), « Peintres et Graveurs libertins du XVIIIe siècle », grand in-4, Méricant, 1913, 30 ex. sur vélin de Hollande, plus un « tirage limité » (re-sic) et numéroté.
 
Calamar

Plaisirs secrets, braconnage matutinal, corps qui se frôlent. C'est l'aube au marché Georges Brassens...

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Amis Bibliophiles bonsoir,
 
 
Chassant la nuit, une méchante lueur, l'aube peut-être, révèle un ciel noirâtre et des trottoirs mouillés.
 
Vous vous trouvez aux limes du 15°, là ou l’ancien fossé de petite ceinture sépare l'urbs patricienne de la terra incognita des zones 2 et suivantes. Face à vous, bordée de hautes grilles, une friche industrielle de tuile et de fonte se dessine sous la pluie. Vous considérez un enclos pavé ; enclos ouvert aux quatre vents ; pavés sur lesquels, en des temps pas si lointains, on égorgeait les chevaux; vents qui s’engouffrant entre les tuiles disjointes, semblent rapporter un écho de leurs plaintes.
 
En ce jour qui peine à naître, des silhouettes se dessinent. Des groupes se forment et se confondent. Certains s’attirent, d'autres s’observent et quand l'offre s'apparie à la demande, des couples se détachent pour retourner à la pénombre. Et si d'aventure, il vous prend de les suivre, leurs souffles rauques et leurs regards égarés vous maintiennent à distance de ces rapports qui ne sont plus tout à fait humains. Mais si vous tendez l'oreille, vous vous apercevez qu'il est question de désir, de possession et de fric, et si vous mobilisez encore plus vos sens, il ne tient qu'à vos narines de remarquer l’entêtante odeur de cuir que dégagent ces échanges.
 
Quelle explication, hormis un accès de folie subite, pouvez-vous donner à votre présence en ces lieux ? Quelle addiction mille fois plus forte que ce qui vous sert de volonté, vous a fait quitter votre lit douillet et les contours tièdes de votre douce et tendre ? Quelles puissances innomées vous poussent à braver les vents alizés et la pluie qui s'insinue dans votre col. Et qu’espérez-vous cacher à votre juge, celui qui sait tout, quand le moment sera venu de vous prosterner devant sa face ?
 
Allez, admettez… Vous êtes ici pour satisfaire votre vice, ce vice resté impuni. Ce goût dont la seule évocation fait frissonner tout votre corps. Ce goût inavouable dont votre épouse doit bien malgré elle porter le secret. Ce goût que vous taisez sur votre lieu de travail, de peur que son aveu ne vous condamne à rester toute votre vie simple capo et ne jamais devenir celui di tutti capi. Ce goût qui, perturbant vos glandes endocrines, vous hante depuis votre prime adolescence et, pourtant rendu au statut d’adulte cartésien, vous possède aujourd’hui, corps et bien. Ce goût qui est la raison, si le terme raison a encore un sens pour vous, de votre présence en ces lieux.
 
Le seul endroit ou vous pouvez satisfaire, exultant et sans vergogne, votre vice capital ; ce vice qui est votre maître...
 
Votre goût immodéré, irrépressible, irréfrené pour les livres...
 
Vous êtes au marché Brassens.
 
Ici vous redevenez vous-même ; ici vous retournez à l'état de nature. Enfin, vous vous dressez nu, si ce n'est un pagne ceignant vos reins et un os traversant vos narines. La sagaie à la main, de rauques mélopées s’échappent de votre bouche et soudain, vous prenez la piste, vif et agile sur la corne de vos pieds. C'est votre moi originel qui culbute, cul par dessus tête, votre moi civilisé. Vous êtes redevenu le chasseur primitif aux longues foulées ; vos ancêtres vous parlent à l’oreille et les esprits qui logent dans le ciel chantent votre renommée.
 
 
Autour de vous des masses improbables s'ébranlent, enchainant des équilibres incertains. Malgré leurs 4 roues, 2 dans les cas extrêmes, seule une imagination extraordinaire peut se le représenter en mouvement. Et pourtant elles bougent, franchissent en ahanant les grilles et viennent s’arrêter, toutes gémissantes de l'effort indu, à leurs emplacements de destination.
 
Vous êtes un vieux de la vieille, un chineur sachant chiner. Vous savez quels véhicules pister, quelles plaques d’immatriculation portent des promesses et derrière quels volants se cachent ceux qu’il faut guetter. Fondant sur votre proie avant même qu’elle n’ouvre ses portes, vous l’acculez au gite. Il lui faudra répondre si elle veut en sortir.
 
- Rien pour moi ?
 
Ce Rien ou le R porte l'accent tonique pour rouler dans les voyelles et expirer dans le n. Ce Rien qui ne cherche qu'à conjurer le mauvais sort, car, bien sur, vous aspirez de toute votre âme à ce qu'il y ait quelque chose, quelque chose pour vous. Que l'on vous lance un Oui ou un Peut-être. Qu'en ce jour vous ayez votre chance ; pas une veine insolente, juste l’honnête fortune qui donne du volume à la gibecière et assure l’existence au moins jusqu'au retour en ces lieux, dans une semaine exactement.
 
A noter que vous préférez le Peut-être au Oui. Le Oui vous inquiète. Car si ce Oui a raison d’être et que ce que l'on vous montre, vous manque ; alors on possède à tort quelque chose que, à tort tout autant, vous ne possédez pas. La réalité est brutale ; cette chasse que vous pensiez gardée a été braconnée. Pire, au pincement qui saisit votre entrejambe, vous comprenez que vous êtes désormais une cible… de chasseur, vous êtes devenu chassé.
 
Même si vous répondez à ce Oui par un joyeux Ah…, on vous surprend à souhaiterque vous l'ayez déjà, du moins en meilleure condition, à bruler plusieurs cierges pour que ce que vous ne possédez pas, ne soit plus désirable que ce que vous avez déjà.
 
Mais si par malheur, à moins qu’il ne s’agisse d’un bonheur masochiste, vous avez toujours rêvé qu'il soit à vous…
 
Alors misère de vous. Vous vous croyez face au mur ? Erreur, le mur vous laisse le choix, le passer ou pas. Vous êtes à l’extrême bord de la roche Tarpéienne, vous n’avez nul choix ; il faut sauter.
 
Il ne vous reste qu'à crier miséricorde, implorer un traitement humain, supplier que l’on vous fasse grâce ; en l’occurrence un prix, un vrai. Un de ceux qui marquent les esprits et scellent d’office la transaction. Un prix d’ami pour ainsi dire, du moins qui sonne le début d’une sincère amitié. Une remise si mémorable qu’elle induira un courant constant de transactions à venir ; car preneur vous l’êtes et acheteur vous vous proclamez; de la politesse que l’on vous fait, vous vous souviendrez.
 
Et comment ferez-vous sans cette réduction, que vous aimeriez au format compression, pour prouver à votre entourage que vous n’êtes pas totalement le jouet de vos pulsions ; éviter, sinon l’internement d’office, la mise sous tutelle et la dépossession de vos avoirs. Et comment conjurerez-vous le malheur qui ne manquera pas de s’abattre quand, en compensation de cette folie, on vous forcera à vous séparer d'une autre de vos prises. Faut-il, alors que l’on vous saigne, supporter à la suite d’avoir les entrailles vidées ? Et quel destin funeste attendra cette merveille qui s'empile dans le couloir, bloque la porte de la cuisine et menace de s’effondrer dans le salon ?
 
A l'inverse du Oui, le Peut-être vous enchante, même si parfois il cache un retournement. Ce devrait être un Ouicependant le prix est tellement exorbitant qu’il vous revient soudain que vous auriez dû mieux payer le précédent Peut-être que l'on vous fit.Mais ce malheur écarté, vous frétillez.
 
Allez-vous abattre les frontières et repousser à l'infini les limites de votre sujet ? Est-il enfin là, ce raccord universel qui donnera une valeur cosmique à votre collection ; fera de vous le sapiteur de toute sapience, humblement voué à l'esbaudissement de ses contemporains ?
 
Sur ce Peut-être votre main, vive et ferme, s'est abattue.
 
- L'est-ti complet et combien que ça coute ?
 
La réponse doit vous plaire car votre haleine se charge d’une première ivresse, celle du chasseur qui boit aux veines chaudes de son gibier.
 
Pourtant vous criez que c’est vous que l’on égorge ; que le prix est dissuasif ce qui est le contraire d’attractif et ceci-dit sans vouloir froisser l’actuel propriétaire qui par ailleurs est libraire, ce qui devrait en faire une personne avisée quant aux prix affichés ; qu’à tout bien considérer, il faudrait parler de prix abusif, toujours soi-dit sans intention de vexer. D’ailleurs le rapport est lointain, quasiment hors-sujet. Avec ce genre de Peut-être, il faudrait investir les rayons de la Nationale qui ne compte que 4 tours ce qui parait notoirement insuffisant. On vous connait ; dans le cas contraire  vous ne discuteriez pas une seconde, cracheriez illico au bassinet, paieriez comptant et fourniriez votre propre sac.
 
Finalement vous reposez l’ouvrage ; un sourire triste et c’est l’hallali.
 
-  Merci de me l’avoir proposé…
 
Pourtant votre doigt raide est toujours posé dessus. Tant que cet index sera là, bandé comme un ressort, personne ne pourra le revendiquer. D’ailleurs votre ton change, vous minaudez. Si le prix devient réellement séduisant, un effort pourrait être consenti ; qu’un prix demandé c’est une chose, la réalité du marché une autre et tout le monde sait que sur internet ils marquent n’importe quoi ; qu’enfin si vous faites un pas vers l’autre, enjambant par courtoisie le notable ennui que vous inspire ce texte, il vous parait raisonnable d’attendre de l’autre que, chaussant ses bottes de sept lieux, il se rapproche à son tour de vous et abolisse la distance qui sépare ses prétentions initiales de la somme qu’il vous est décemment possible d’y consacrer ; qu’en résumé vous voulez bien acheter pour faire plaisir, mais qu’il y a des limites à tout, même à votre affabilité.
 
Finalement vos arguments paraissent porter et l’affaire tourner à votre aise.
 
Enfin, il vous appartient.
 
Ami, ne nous faites pas vous courir après vous. Allons, baignez nous d'un peu de votre chance et faites-nous la grâce de nous instruire. Qu'est-ce donc que ce Peut-être qui désormais est à vous ?
 
Tudieu ! 1555, un seizième ! Je vous croyais dans la locomotion... Ah, pardon, le sport.
 
Mais alors, que nous vaut ce vélin ?
 
Ventredieu ! Le Des bains & antiques exercitations... du sieur Du Choul.
 
Une impression lyonnaise nous susurrez-vous, avant que de l'ouvrir sur une page portant en plein un bois gravé. Deux pugilistes se cognant à coups de cestes. Discipline olympique nous assurez-vous ; l’ancêtre de la boxe béons-nous.
 
Mais quelle est cette ombre à votre front pourtant couvert des lauriers du triomphe ? Craindriez-vous le moment du retour et l’ire de votre moitié ? C’est vrai que le débours n’a pas été bénin et que les seizièmes paraissent osés quand il question de la bibliothèque d’un honorable sportsman. Et s’il s’agit de les ranger entre deux numéros spéciaux de l’Illustration, ils ne font que confirmer ce que votre épouse baptise une contamination perverse… vous avez viré bibliophile.
 
C’est à pas de loup que vous franchissez le seuil de votre demeure… De loup ? Plutôt de souriceau apeuré. Heureusement la distance n’est pas trop grande jusqu’au votre bureau. La serrure n’a pas grincé, les lames du parquet n’ont pas craqué et aucune de vos piles de livres ne s’est effondrée. Vous allez peut-être y arriver…
 
- Mon bibliofilou, que ramènes-tu de ton marché ?
 
- Pas grand'chose, mon adorée ; vous savez bien que plus le temps passe et plus il se paupérise. On n'y trouve pour ainsi dire plus rien...

A suivre.
Ugo

Les grands livres / dans la bibliothèque du Bibliophile: La Découverte australe Par un Homme-volant, de Nicolas Restif de la Bretonne

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Amis Bibliophiles bonsoir,
 
Quand on cherche un ouvrage depuis longtemps, c'est toujours un immense plaisir de le voir rejoindre sa bibliothèque. Celui-ci en particulier...
 
La Découverte australe Par un Homme-volant, ou Le Dédale français Nouvelle très-philosophique: Suivie de la Lettre d'un Singe
Restif de la Bretonne (Nicolas-Edme)
Leipzig, Et se trouve à Paris, s.d. [1781].
Quatre tomes en 2 volumes in-12, demi-chagrin bordeaux, dos orné, pièces de titre et de tomaison vertes, tranches lisses (Reliure moderne).
Édition originale de ce roman utopique très recherché. Elle est illustrée de 23 jolies et curieuses figures gravées en taille-douce, dont une dépliante, lesquelles représentent l'homme-volant prenant son envol et plusieurs créatures hybrides. Ces planches ne sont pas signées. Annotations manuscrites à la plume dans la marge d'une page.
 
 
L'exemplaire est bien complet du rare faux-titre intitulé oeuvres posthumes de N, daté 1781. Plusieurs feuillets plus courts, restauration de papier sur le bord du titre du tome III et en marge de la planche dépliante. Le bord d'une des planches est replié. Tome IV, manquent le feuillet P6, correspondant aux pages 335-336, et les 3 derniers feuillets adressés au lecteur avant la table des figures.
Ce roman, publié en 1781, est une œuvre foisonnante, multipliant les genres littéraires, tenant à la fois de l’utopie sociale et politique, du fantastique, de la science-fiction et du voyage de découverte. Rétif l’a fait illustrer par son dessinateur fétiche, Binet (sur lequel on sait fort peu de choses), choisissant vraisemblablement, comme à son habitude, les épisodes pour lesquels il souhaitait des gravures. Dans l’édition originale, un commentaire de Rétif accompagne d’ailleurs, le plus souvent, les illustrations.
Le héros du roman, Victorin, est amoureux de Christine, qui est la fille de son seigneur : cet amour paraît donc impossible. Mais il réussit à mettre au point une machine qui lui permet de voler, grâce à un système de pédales et d’ailes articulées.

 
Grâce à ce formidable instrument de pouvoir, il enlève Christine et l’emmène jusqu’au sommet d’une montagne, le « Mont-Inaccessible », auquel on ne peut accéder que par les airs. Puis, il y fait venir d’autres personnes soigneusement choisies, et fonde une société (dont Victorin et sa famille, qui possèdent le pouvoir de voler, forment l’aristocratie) où doit régner le bonheur parfait. Au bout d’une vingtaine d’années, Victorin décide de quitter sa montagne pour aller à la découverte des îles australes, afin d’y créer un vaste royaume du bonheur. La première île découverte est l’île des « Hommes de nuit », « créatures presque humaines » qui ne vivent que la nuit. Victorin y fait venir tous les membres de la colonie du « Mont-Inaccessible », et l’île est baptisée « île Christine ».
Dans les années qui suivent, les hommes-volants découvrent les autres terres australes et leurs populations, constituées d’êtres étranges et fantastiques, le plus souvent créatures hybrides hommes- animaux : les Patagons (hommes géants), les hommes-ours, les hommes-chiens, les hommes-cochons… Chaque fois, les Christiniens s’emparent d’un couple d’hommes-animaux pour les éduquer selon leurs mœurs, et les croiser avec d’autres espèces afin de réduire leur part d’animalité : vaste mission de colonisation civilisatrice ! Le dernier peuple rencontré est celui des Mégapatagons, qui ont réussi à réaliser la cité rétivienne idéale : égalité des êtres, communisme, mesures natalistes… Mais Victorin, conscient que les Européens ne sont pas prêts à de pareils usages, se borne à recommander un perfectionnement des anciennes lois, en attendant le temps de la perfection.




 
Jacques Lacarrière, dans sa préface de l’œuvre dans la collection « Bouquins », met en avant un certain nombre de points intéressants pour l’étude du roman de Rétif : - l’importance au XVIIIe siècle, dans la mouvance des Lumières, d’une littérature cédant abondamment à la manie « de vouloir à tout prix inventorier, disséquer et même appliquer sur cette terre les lois qui présideraient au bonheur humain. » - la corrélation chronologique du roman avec les récits de voyages de Cook, Bougainville ou La Pérouse, grands découvreurs, au XVIIIe siècle, de terres et de peuples encore inconnus. - le rappel, face aux descriptions des « paradis » naturels qui figurent dans La Découverte australe, d’un célèbre épisode de l’enfance de l’écrivain que celui-ci évoque dans son autobiographie, Monsieur Nicolas : sa découverte, à proximité du village où il habitait, d’un vallon isolé qui lui valut « sa première exaltation devant le spectacle d’une nature encore vierge ».



 
Le petit Nicolas se déclare maître de ce royaume, puis le présente à quelques camarades, « légiférant, distribuant sanctions et récompenses et appariant les couples ». - le rôle de la machine volante comme instrument de pouvoir : « s’affranchir du sol et de la pesanteur, c’est aussi s’affranchir des lois et des contingences de la terre, acquérir pouvoir et supériorité sur tous les autres hommes, devenir un surhomme plus encore qu’un oiseau. » Seuls Victorin et sa famille restent détenteurs du privilège de voler, qui leur assure le pouvoir sur leurs sujets. « Un pas de plus dans cette voie et l’on aboutira, dans le siècle suivant, à des œuvres comme Robur le Conquérant ou Le Maître du monde de Jules Verne. » Le pouvoir que confère l’invention contraint l’inventeur « à devenir aussi un philosophe, un organisateur autant qu’un technicien.
Écrite à la veille de la Révolution, La Découverte australe pressent déjà ce que sera la grande affaire du siècle à venir et sa véritable utopie : la libération possible de l’homme par les conquêtes de la technique et de la science. Restif y apparaît comme un rêveur invétéré mais un rêveur plus proche par endroits de Jules Verne et de Wells que des philosophes de son temps. » - le caractère monstrueux et inhumain de toutes les utopies qui prétendent imposer un bonheur forcé à l’être humain, par tout un système d’obligations et d’interdits touchant à chaque aspect de la vie, y compris et surtout, en matière d’amour et de rapports sexuels. La contradiction est flagrante dans le roman de Rétif : c’est pour être libre de son amour pour Christine que Victorin bâtit la cité idéale, mais dans cette cité, seuls sont libres de s’aimer librement ceux qui détiennent le pouvoir (voir le règlement de l’île Christine).
Lacarrière cite un autre texte de Rétif extrait du Paysan perverti, les Statuts du bourg d’Oudun composé de la famille R*** vivant en commun, dans lequel Rétif « imagine en plein XVIIIe siècle –sous le nom de Ferme collective- ce que seront plus tard les communes populaires en Chine. Tout y est inscrit, écrit, prévu et notifié », les repas qu’il faudra servir les jours de fête, les jeux auxquels les enfants devront jouer etc. De plus, « jamais l’inégalité foncière entre hommes et femmes (au détriment de ces dernières) n’est plus visible qu’en cette communauté où rien n’est identique –même un dessert, même un jeu- entre un homme et une femme ».  - l’imagination heureuse de Rétif en ce qui concerne les espèces hybrides merveilleuses rencontrées par les hommes-volants.
« Ce que découvrent Victorin et ses fils à travers les dizaines d’îles inconnues réparties dans l’archipel austral, c’est un peu la longue marche de l’humanité, une sorte de continent fossile où, à l’instar du Monde perdu de Conan Doyle ou de Caspak, monde oublié d’Edgard Rice Burroughs, l’on surprend des êtres qu’on croyait disparus ou légendaires, une sorte de laboratoire vivant où demeurent miraculeusement préservés tous les essais de la nature pour parvenir à l’homme. »  Mais il convient de noter aussi les naïvetés dans l’invention des langues parlées par chaque espèce (de l’onomatopée, au jargon petit nègre, pour finir par le français à l’envers des Mégapatagons) : « Tel serait en définitive l’humble et piteux secret des antipodes : on y  parle à l’envers tout en y pensant à l’endroit et en ce simple détail auquel Restif ne semble pas avoir prêté grande attention, réside le faux mystère de ce monde utopique. »
"Cet ouvrage est l'un des plus bizarres de Restif et l'un des moins communs. Les récents progrès de l'aviation ont attiré l'attention des curieux sur ce livre que nous croyons devoir augmenter rapidement de prix." (Cohen)
 
"Cet ouvrage, un des plus singuliers que Restif ait écrits, est fort recherché, non seulement par les rétiviens mais aussi par des collectionneurs de livres sur les utopies et l'aéronautique. "Il est vraiment remarquable, dit Lacroix, que Restif ait porté ses recherches sur la manière de voyager dans les airs, trois ans avant la découverte des frères Montgolfier, qui firent la première expérience des aérostats au mois de juin 1783. "Il est encore remarquable, quoique personne ne l'ait signalé, que Restif, dans cet ouvrage ait prévu un véhicule pouvant rouler sans chevaux. Dans l'intérêt de la paix, il propose une association des nations européennes. Chose encore plus curieuse, Restif, anticipant la société protectrice des animaux, demande qu'on soit juste envers les animaux." (Rive Childs).
 
"La base du système physique développé dans cet ouvrage est qu'originairement il n'y eut qu'un seul animal et qu'un seul végétal sur notre globe. Ce sont les différences de sol et de température qui ont amené la variété des êtres et produit des animaux mixtes. La description de la machine inventée par Victorin pour s'élever dans les airs, est faite pour intéresser beaucoup de personnes." (Monselet, Restif de la Bretonne, n°22)
Pour en savoir plus:

Aristophil dans les médias, le mal est fait... et le silence du SLAM

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Amis Bibliophiles bonsoir,
 
Il ne se passe quasiment pas un jour sans qu'Aristophil ne soit mentionné dans les médias, c'est triste, et quoi qu'il advienne, le mal est fait, et il est quadruplement fait même.
 
Le mal est fait pour Aristophil qui aura du mal à se remettre de tout ce qui se passe en ce moment, quoi qu'il advienne. La confiance en effet est rompue. Quiconque se posera désormais la question d'investir dans ce type de produits financiers sera dissuadé en un clic sur Google.
 
L'étonnant blason d'Aristophil
 
Le mal est fait pour les investisseurs, dont on sait encore s'ils pourront récupérer leurs investissements. Près de 18 000 foyers sont concernés (Source Gérard Lhéritier, Nice Matin) et je me mets parfois à leur place aujourd'hui: impossible de joindre Aristophil, site fermé, comme celui du Musée des Lettres et Manuscrits, d'ailleurs. Ca sent la fin de règne.
 
Le mal est fait pour les 70 salariés d'Aristophil et de ses diverses extensions, qui ne peuvent aujourd'hui être payés, tous les comptes, personnels ou professionnels de la société et de ses représentants, en France, en Belgique et au Luxembourg ayant été saisis (source Libération, 1er décembre 2014). Libération précise également que la société n'a pu clore son exercice 2013 qu'avec cinq mois de retard, et après que M. Lhéritier ait renfloué la société via 35 millions d'euros pris sur ses deniers personnels.
 
Le mal est fait, enfin et d'une certaine façon pour le marché du livre ancien et surtout pour son image: d'une part parce que je vois difficilement comment l'arrivée des plus de 135 000 livres et manuscrits concernés pourrait se faire sans conséquence pour le marché et ses prix.
 
Mais aussi, d'autre part, d'une façon un peu plus sournoise: des titres de presse nationaux  - et internationaux - se font aujourd'hui l'écho des déboires d'Aristophil et d'une façon ou d'une autre jettent le doute, si ce n'est l'opprobre, sur la probité de ce marché pour ceux qui le connaissent mal.
 
Ainsi, imaginons un particulier ayant un livre à vendre à un libraire par exemple, exposé à ce type de message dans la presse. Comment croyez-vous qu'il va réagir en réalisant que le montant proposé par le libraire est potentiellement x fois inférieur à la valeur de l'objet, cf. Cellulairement, acheté 300 000 euros chez Sotheby's, et revendu 1,5 million d'euros aux investisseurs d'Aristophil. Le doute est potentiellement semé sur l'ensemble de la chaîne. Parce que le doute est semé, à tort ou à raison, comment faire confiance à un expert ou un libraire. C'est dramatique.  
 
Imaginons un particulier acheteur cette fois-ci. Il est actuellement exposé à un ensemble d'informations qui jettent le doute sur l'ensemble de l'écosystème: dans chaque article sont cités les SVVs, certains libraires... et même des experts. A qui faire confiance dans ce cas? Et ce d'autant plus que lus rapidement, ces articles sèment également le doute sur le potentiel retour sur investissement d'une acquisition. Certains acheteurs se posent toujours la question de la revente à l'achat, mais d'autres plus simplement, et c'est logique, souhaitent quand même ne pas trop en perdre.
 
Aujourd'hui, à l'aune de ces articles, il est difficile pour le béotien de savoir trier le bon grain de l'ivraie. Cette histoire jette forcément un voile sur le marché, et c'est fort dommage à un moment où il aurait bien besoin de nouveaux entrants et où j'entends chaque jour des libraires se plaindre.
 
Je vous donne un autre exemple: à force de me voir recevoir des catalogues ou des ouvrages sur mon lieu de travail, mes collègues savent désormais peu ou prou que je suis bibliophile. Nous n'en parlions jamais vraiment, sauf depuis deux semaines, où plusieurs d'entre eux m'ont demandé si j'avais vu passé ces informations, et les mots qui reviennent le plus souvent sont arnaque, Ponzi, experts pourris, libraires complices... et moi en pigeon! :)
 
Il ne s'agît pas ici de jeter le bébé avec l'eau du bain, ou de faire un amalgame entre tous les experts et tous les libraires... mais comme l'a justement suggéré Benoît dans un commentaire, après un silence assourdissant et qui dure depuis plusieurs années, peut-être serait-il temps que le SLAM s'exprime, ou au moins réagisse.
 
C'est extrêmement délicat, c'est difficile, d'autant que certains membres du SLAM seront potentiellement concernés par les développements de l'histoire, mais c'est vital pour continuer à faire connaître et aimer le livre ancien. C'est le rôle d'un syndicat professionnel de s'exprimer sur ces sujets, de défendre ses membres et son industrie. Des amateurs ont forcément vendu ou acheté des livres via les acteurs cités, et je ne parle pas seulement d'Aristophil. Pour certains, il est vraisemblable que cela a un goût amer.
 
Du reste, quand on relit la définition du SLAM sur son site internet, une prise de position semble légitime. Comment un Syndicat professionnel pourrait-il être sourd à ce qui se passe?
 
Le Syndicat National de la Librairie Ancienne et Moderne (SLAM) créé en 1914, est l'une des plus importantes et anciennes Associations de libraires de livres anciens au monde, précédée seulement par l'Association Britannique le ABA fondé en 1906. Une de ses vocations est de faire connaître au public le monde du livre ancien.
 
Il est le seul représentant de la librairie ancienne en France. Ses interventions sont nombreuses tant auprès des pouvoirs publics qu'auprès des organismes privés et des libraires. Ses actions sont également nombreuses pour la promotion de la librairie et la connaissance du livre. Il regroupe près de 250 libraires, marchands d'autographes et d'estampes, dont la compétence et la probité sont attestées par des conditions d'admission difficiles. Tous vous garantissent :
 
- Compétence et connaissance
- L'authenticité des livres, manuscrits et autographes
- Honnêteté et professionnalisme
, et de bons rapports commerciaux partout à travers le monde.

Experts dans leurs domaines, ils assurent le maintien de la tradition bibliophilique et préparent la bibliophilie de demain. Ils sont le rouage essentiel de la connaissance et de la préservation du patrimoine. Ils vous conseillent dans vos achats ainsi que pour la valorisation ou la vente de votre bibliothèque. Leurs catalogues de vente sont également des outils bibliographiques précieux.
 
Les deux protagonistes professionnels cités dans les médias (et dont il faut respecter la présomption d'innocence), sont membres du SLAM, et là encore, de leur part comme de celle du Syndicat, pas de réaction?
 
Les mots clefs de cette affaire (Tracfin, Ponzi, expert, saisie, librairie perquisitionnée, Sade volé à la famille de Noailles et acquis par Aristophil, documents de De Gaulle réclamés par les Archives Nationales), avérés ou pas, jettent forcément un discrédit sur ce marché et une partie de ses acteurs. C'est très triste.
 
Le SLAM peut-il faire la sourde oreille (vous direz, les muets sont souvent sourds) comme il la fait depuis des années malgré quelques mises au point par Anne Lamort, qu'il faut saluer, ou doit-il nécessairement s'activer non pas pour condamner ce qui se passe, mais pour dans ces moments difficiles, redorer le blason du Livre Ancien?
 
Les moyens sont nombreux, et c'est ce qu'on attend d'un syndicat professionnel: campagne de publicité, lobbying, exposition, conférences, non pas sur le sujet mais sur celui qui nous passionne, le Livre. Non pas s'exprimer sur ce qui secoue le microcosme et même plus, mais justement ramener l'amour du livre à ses fondamentaux. En ce moment, c'est sans doute plus important que d'attribuer un prix de bibliographie.
 
H

Sociétés de Bibliophiles: un rarissime jeton de la société des Bibliophiles de Reims

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Amis Bibliophiles bonjour,

C'est en trouvant le jeton que vous trouverez la société de Bibliophiles... Je n'avais ainsi jamais entendu parler des Bibliophiles de Reims avant de chiner ce joli jeton.


Il est inhabituel à plusieurs titres: d'une part il est assez grand par rapport aux autres jetons, 60 mm, d'autre part il est en plomb, et enfin il porte le nom de tous les sociétaires, ce qui en fait un témoin idéal de la vie de la société.

En le détaillant on sait tout ou presque de cette société. On connaît sa durée, du 8 août 1841 au 11 juin 1843; on connait son but "faire imprimer des ouvrages inédits ou devenus très rares"; on connaît le nombre de publications, 12.



On connaît enfin la composition du comité d'administration, et le nom de tous les sociétaires.





On notera que bibliophilie et champagne font bon ménage.

H

Scoop mondial :) ... mais qui sont vraiment les soutiens d'Aristophil? Le fichier Clearstream de la bibliophilie

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Amis Bibliophiles bonjour,
 
Même si je m'étais juré de ne pas revenir sur Aristophil cette semaine, il m'est difficile d'échapper à l'actualité brûlante, chaque jour apportant son nouveau lot d'informations.
 
Hier, c'était le Slam, qui, à son rythme, condamnait de sa main droite toute logique d'investissement, tout en cliquant de sa main gauche sur la vidéo de l'un de ses présidents d'honneur et membre de droit de son conseil d'administration vantant Aristophil et les culbutes potentielles (https://www.youtube.com/watch?v=fcTFwmVwfgg)... aujourd'hui, c'est Aristophil dans toute sa splendeur qui nous offre le scoop du jour. Aristophil alias les Pieds Nickelés aux manettes.
 
Bibliophile, je suis aussi assez connaisseur des médias et des nouvelles technologies, et alors que je me promenais sur Facebook et twitter aujourd'hui, j'ai vu apparaître, presque en temps réel deux groupes de soutien à Aristophil, un sur chacun de ces réseaux sociaux.
 
Sur Facebook, ce groupe est nommé "Soutenons Aristophil" (https://www.facebook.com/pages/Soutenons-Aristophil/875327689186163).
 
Créé hier, il s'enorgueillit de 366 mentions "J'aime", dont la mienne, et a pris la parole en criant au complot, avec un magnifique et très éloquent visuel.
 
 
 
Ces personnes sont toutes, arrivées hier, à l'ouverture, massivement. En prenant un peu de temps, on constate que nombre de ces profils sont des conseillers en placement divers... Hélas, impossible d'avoir la liste exhaustive de ces soutiens sur ce réseau social.
 
Twitter est un réseau social différent. Sur Twitter la page "Soutenons Aristophil" peut se trouver sous l'alias @pouraristophil.
 
 
Le contenu est le même, on y parle de lapidation, de vol, de complot. Oui mais voilà, Twitter est un réseau social plus ouvert.
 
Sur ce réseau on sait qui soutient une page, donc dans le cas présent, en regardant qui soutient la page "Soutenons Aristophil", et bien, c'est simple, on a enfin la liste des soutiens d'Aristophil. Enfin!
 
Et ils sont nombreux.  Là aussi près de 300 soutiens en un seul jour, tous arrivés entre hier et aujourd'hui, massivement (c'est amusant, 300, c'est plus que les amis du compte Aristophil). On croyait Aristophil sans défense, et bien on se trompe.
 
La page elle même a été crée par un certain Edouard Gerandi, qui a créé son propre compte twitter hier, juste avant de créer le compte de soutien à Aristophil.
 
D'Edouard Gerandi, je ne sais rien, ni Google d'ailleurs, ni Bing, ni Facebook, ni LinkedIn, et je le présume, ni les impôts. Il n'existe probablement pas. Mais passons, intéressons nous à la liste des soutiens à Aristophil. Cette fois c'est sûr on va avoir du lourd, du people, du VIP, du politique, du libraire tiens, même, soyons fous...
 
Près de 300 soutiens en un jour, on se bouscule au portillon, en plus ils se sont donnés le mot, ils sont tous arrivés en même temps, une traînée de poudre, la révolte gronde dans les rangs des défenseurs d'Aristophil. La révolution, même, elle est en marche, et rien ne l'arrêtera. Enfin bref, cette liste brûlante, autant vous le dire c'est le fichier Clearstream de la bibliophilie. De la bombe bébé. Nucléaire. Ca va éparpiller façon puzzle. Vous en voulez? Vous en voulez? Bon ok, je lâche tout. Peu importe les conséquences. M'en fous.
 
Prenons trois soutiens d'Aristophil dans les premiers rangs:
 
 
Jordan Vidal, d'emblée, ça m'a rassuré, l'empereur du Burkina Faso et le Flam (c'est le Slam du flamenco) sont derrière Aristophil, des soutiens de poids, de l'international, ça va peser à La Haye ou à l'ONU, de l'artistique, ça va peser dans Danse avec les Stars.
 
 
Autre bon point à l'international, ami Aristophil, les trolls mexicains sont avec toi également, et à défaut d'oranges, tu pourras toujours compter sur du crumble.
 
 
Habbl France est de la partie..., quand je pense qu'on se plaint sans cesse du manque d'intérêt des jeunes pour la bibliophilie! Aristophil, les ados avec toi! Gérard, des nouveaux potes!

 
Bon là, j'ai rien compris, mais ça sent bon aussi comme soutien, c'est du lourd, ça peut peser dans la balance.
 
 

Avec Quentin et Cristina, je fais moins le malin, experts en cybercriminalité et en criminologie, mais pourquoi soutenir Aristophil? Gérard, t'es trankil!
 
Continuons de dérouler cette liste fascinante, mais déroutante. Ce n'est pas évident, aucun nom ou pseudonyme français, ligne après ligne.
 
Le Libéria aussi est là, sa Majesté en personne, même si là, la photo est peut-être un clin d'œil :). Mais Est-ce un G et un L que je distingue sur le ceinturon? Et si c'était? Noooon! Enorme!
 

Bref, tout est à l'avenant, vous trouverez la liste ici: https://twitter.com/EDOUARDGERANDI/followers

Je termine avec mes préférés, encore une fois du lourd, surtout Anabel que tous les bibliophiles connaissent bien. Anabel, moi croyais que toi et moi c'était du solide, là, tu me déçois un peu... Mais bon, je reconnais là ton goût pour la liberté.


Que vous soyez spécialiste des réseaux sociaux ou non, vous l'aurez compris, ce compte de soutien monté par une personne fantôme pour Aristophil a acquis des "soutiens", des "fans", des "amis", auprès de sociétés spécialisées.
 
Ces profils fantômes s'achètent par centaines, pour des sommes modiques et permettent de booster la popularité d'un profil. C'est un procédé vieux comme twitter, mais auquel plus personne de sérieux ne se risque depuis que quelques politiciens se sont fait prendre. Bref à éviter à tout prix, surtout quand son image est un peu secouée dans les médias, c'est de l'amateurisme.
 
Pour nous convaincre que tout ceci était un complot, pour nous montrer combien Aristophil était soutenu, c'est tout ce que certaines personnes ont trouvé à faire.
 
Vous me direz, acheter de faux comptes, c'est une forme de spéculation. Les mauvaises habitudes, cela se perd rarement.
 
Pour ce qui est des vrais soutiens à Aristophil, pas besoin de fichier Clearstream, tout le monde les connaît, vous n'avez qu'à aller voir sur leur site. Il n'y a plus de site?
 
Mince :).
 
Hugues

Ebayana et Bibliophilie, livres anciens en vente sur ebay: belles reliures, EO, livres à planches, éditions du 16ème au 20ème siècle et curiosités

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Amis Bibliophiles bonjour,

Voici une sélection de livres intéressants actuellement en vente sur eBay.

Vous pouvez en retrouver beaucoup plus sur http://encheresbibliophiles.fr/


En passant, j'ai ajouté de nouvelles catégories sur http://encheresbibliophiles.fr/, si vous aimez la philatélie, le militaria, la numismatique ou les antiquités en général, vous pourrez retrouver sur le site les objets de ces catégories toujours classés par critères: les plus suivis, les plus chers, les plus enchéris.



1555 SACERDOTALE Catholic Liturgy CHURCH MUSIC EXORCISM rare RENAISSANCE BINDING



Imperatoris Iustiniani sacratissimi principis, Volumen legum - Paris 1536

O. UZANNE L'ART DANS LA DECORATION EXTERIEURE DES LIVRES E.O. EX. NUM. 1898

les plus secrets mysteres des hauts grades de la maçonnerie devoilés 1766

LA VIE MODE D'EMPLOI GEORGES PEREC - ENVOI AUTOGRAPHE SIGNÉ - ANNÉE DE L'ÉO



BIBLIOPHILIE: FENELON TELEMAQUE 1785 RELIURE MAROQUIN IN FOLIO 2 VOLUMES

ROUSSEAU Oeuvres 38/38 BOTANIQUE 44 GRAVURES Couleurs Philosophie Musique 1788



Emile ZOLA Thérèse Raquin 1892 dédicace autographe au comédien Antoine

Nostradamus: Les Prophéties - TOP SELTENE AUSGABE VON 1605 !!!

LA FONTAINE "Fables choisies" Figures par FESSARD, Texte de MONTULAY + 1765 +

1748, RELIURE AUX ARMES DE LA ROCHEFOUCAULD, Anecdotes de la cour de François I


Livre tres ancien (1557) La Grand'Monarchie de France.

JEAN DE LA FONTAINE CONTES 80 PLANCHES EISEN CONTREFACON FERMIERS GENERAUX 1777

BUSCA ++ ARCHITECTURE ++ 1601 ++ MILAN ++ SOMPTUEUX LIVRE ++ FIGURES

Superbe ++ DAPHNIS et CHLOE ++ 1792 ++ 30 GRAVURES ++ 1792 ++ Tirage "DU REGENT"


3 volumes in-FOLIO +MONUMENTAL LIVRE GRAVé+ FASTES de la NATION+ 207 GRAVURES +

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Retour de marché: Ibra, Didon, Végèce... scène de ménage chez le bibliophile

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Amis Bibliophiles bonjour,

Souvenez-nous, notre héros rentre du marché Brassens, un joli XVIe sous le bras, Des bains & antiques exercitations de Du Choul.
 
 
"- Mon bibliofilou, que ramènes-tu de ton marché ?
- Pas grand'chose, mon adorée ; vous savez bien que plus le temps passe et plus il s’appauvrit. Une misère absolue... On n'y trouve pour ainsi dire rien. Cependant je vous ai dégoté un mignon Almanach des Demoiselles en belle reliure romantique ; vous serez ravie...- Mon chéri-chéri, je te l'ai pourtant répété cent fois : je ne collectionne pas les almanachs... Comment te le dire ? Dois-je le chanter ? Dois-je glisser des petits mémos sous ton oreiller ?
- Ma bien-aimée...
- D'ailleurs je ne pense pas avoir jamais collectionné quoi que ce soit de ma vie, rien de rien, rien-du-tout-du-tout ; ni sacs à main, ni Louboutins et certainement pas des bouquins. Par contre je côtoie régulièrement un être vil et fourbe qui m'assure, à mon corps défendant, qu'une petite série d'ouvrages pour dames décorerait agréablement le peu d'espace personnel qu’il me reste dans cette maison. Ce à quoi, dois-je aussi te le rappeler, je me suis toujours opposée.
- Ma dive bouteille, vous exagérez…
- Mon tire-bouchon, te connaissant comme je te connais, je devine que cet almanach cache quelque chose. Peut-on savoir quelle est cette bosse à ta besace ?
-Mon bel amour, je te sens ronchonne ce matin. Que dirais-tu d'un petit resto ? La pizzeria, l'Indien ?
- Et que me parles-tu d'indiens quand je vois un livre qui dépasse ?
- Un livre ? Comme vous y allez ma mie... A peine un opuscule, une plaquette, quelques feuillets que le hasard a réunis entre eux. Vraiment rien de notable, ni de conséquent. Le temps de le ranger et nous partons déjeuner. Une pizza ce sera très bien ; une Capricciosa, comme vous les aimez...
 
- Montre !
- Vous y tenez ?
- Et bien sur que je tiens à savoir pourquoi tu m'infliges un Almanach dont je n'ai que faire.
- C'est pourtant très utile pour connaître le calendrier.
- Que Noël tombe un jeudi en 1832, voilà qui m'interpelle et mérite réflexion.
- N'est-ce pas ? Il y a aussi de belles illustrations...
- Ah oui, Didon bécotant Enée sous les marronniers…
- Ce sont plutôt des oliviers.
- … devrait éveiller mes sens ?
- C’est mon désir le plus cher.
- Ne me pousse pas à bout, j’aurais des choses à dire sur ce sujet.
- Je ne cherche point à vous provoquer.
- Et que fais-tu d’autre à cette heure ?
- Le vœu que vous appréciez mes trouvailles.
- Et mon vœu à moi est de ne plus avoir à financer tes fantaisies.
- Mes fantaisies ? Quand je contribue à la conservation du patrimoine ? Quand je détourne des circuits mercantis d’inappréciables œuvres imprimées ?
- Que voila un preux chevalier !
- Je n’avais pas de dragon sous la main.

Montre te dis-je !
- Voila.
- Mais qu’est-ce donc que cette vieillerie ?
- Un seizième, ma très suave.
- Et quel rapport avec le sport ?
- Tout est dans le titre ; par exercitations vous devez comprendre manière de s’exercer.
- Donne !
- C’est fragile, permettez que je le tienne.
- Vas-tu me le donner à la fin ?!?
- Non.
- Non ???
- Le voici.
- Il y a t’il une chance pour que le montant porté ici au crayon, soit un prix en francs ?
- Je crains qu’il ne s’agisse d’euros, ma dulcinée…
- Ah !
- Cependant croyez-bien que je l’ai ardemment négocié et que ce prix affiché est absolument sans rapport avec la somme déboursée. Vous pouvez être fière de moi.
- Te l’aurait-on offert ?
- Malheureusement non.
- Je croyais, monsieur mon conjoint, que nous avions, après plusieurs discussions sur cette association économique que nous formons toi et moi, décidé d'une certaine limite mensuelle aux dépenses que tu peux consacrer à ta collection.
- Il me semble m’en rappeler.
- Limite calculée sur la base de nos participations respectives aux dépenses du foyer…
- J’en conviens.
- Et t'en souvient-il que pour un salaire à peine supérieur au tien, je bosse quasiment deux fois plus que toi ?
- Ma douce et tendre, ce sont les 35 heures, qui puis-je ?
- Aux 35 heures, rien ; au budget du ménage, certainement plus que tu n’y contribues. Et dans le contrat qui fait de moi une épousée, je ne vois nul codicille stipulant que je doive m’éreinter au travail afin de satisfaire les addictions de mon épouseur.
- Bien sur que non, ma contractante.
- Le maire ou le curé m'ont-ils demandé, outre d'être une digne et fertile épouse, de me saigner aux quatre veines ?
- Madame votre mère veillait au grain.
- Je sens que je vais me fâcher…
- Ne l’êtes-vous pas déjà ? 
- Tu n’as encore rien vu.
- Je ne dis plus rien.
- Ai-je manqué une partie de la cérémonie ? S'est-il passé quelque chose que j'ignore encore ? Un évanouissement, des absences, des accès subits de surdité ?
- Il ne m’a pas semblé. 
- Donc hormis ce moment d’égarement ou, pour mon malheur, j’ai dit oui, tu reconnais que je disposais de tout mon entendement ?
- Ma brillante étoile, c’est maintenant que vous vous égarez.
- Aussi, mon luminion, tu reconnaitras qu’il te faille appliquer ce à quoi tu t’es engagé.
- Que voulez-vous dire ?
- Que la place manque tout autant que l’argent et que les anciennes acquisitions doivent financer les nouvelles, ainsi que nous en avons convenu.

- Vous m’effrayez !
- Préfères-tu que je fasse le ménage suivant mon idée ?
- Surtout pas !
- Alors je te laisse choisir. De quoi allons-nous nous débarrasser ?
- Mes numéros de l’Equipe de l’année dernière ?
- Il y a belle lurette que je les ai jetés.
- Vraiment ? Vous me peinez.
- Tu n’as pas fini de pleurer.
- Mes vignettes Panini 
- Comment crois-tu que ton fils a payé ses Rollers ?
- Mais avec quelle permission ?
- Il n’a fait que suivre mon conseil.
- Le serre-tête d’Ibra ?
- Je m’en suis fait des jarretières. Y trouverais-tu à redire ?
- Oui… enfin non… enfin si…
- Que veux-tu mon cher, à fétichiste, fétichiste et demi.
- Tout de même, il vaudrait une fortune aujourd’hui.
- Il n’en souligne que mieux le galbe de mes cuisses.
- Je ne vais tout de même pas sacrifier un livre ?
- C’est pourtant l’objet de notre accord. D’ailleurs tu as épuisé tes trois souhaits; à mon tour donc et que le boudin te saute au nez.
- J’en tremble.

- Am Stram gram… Végèce.
- Ah, non ! Pas le Végèce.
- Si le Végèce, justement…
- Pitié, pourquoi lui ?
- Parce que comme tu le dis si bien, tout est dans le titre De re Miltari. Et si Végèce avait voulu disserter sur le sport je suppose qu’il aurait baptisé son traité De ars Athletica ou quelque chose d’approchant.
- Il y est pourtant question de plongée sous-marine, mon impérieuse Messaline.
- Traite-moi encore une fois de Messaline pour voir...
- Il s’agissait pourtant d’une femme très libre, telle que vous aimez les glorifier.
- Te croirais-tu cocu ?
- A dieu ne plaise !
- D’ailleurs tu ne le seras jamais autant que moi je le suis avec tes bouquins.
- Votre imagination vous abuse.
- Pas plus que la tienne qui fait d’un traité militaire, un manuel sportif.
- La plongée, ma naïade, la plongée subaquatique, voyez ce bois gravé…
- Je ne vois ici qu’un piéton franchissant l'Euphrate.
- Mais avec un scaphandre.
- Avec une cloche sur la tête.
- Pourtant les prébmices sont flagrantes, on dirait Cousteau.
- Et si Clausewitz s’habillait de vert, tu y verrais les prémices de l’ASVEL ?
- Vous savez bien que la guerre est l’antichambre du sport.
- Je sais surtout qu’une bibliothèque sportive raisonnable tout autant que raisonnée, ne saurait commencer plus tôt que Saussure et croitre avant Baudry de Saunier.
- Très bonne idée, j’ai un Saunier en double.
- Serais-tu magicien pour le vendre au prix de ton du Choul ?
- Je peux toujours essayer…

- Ce sera Végèce et je ne veux plus en discuter.
- Mais comment et à qui pourrais-je le négocier ?
- Essaye Ebay puisque tu y passes tes soirées.
- Vous savez bien que la plupart de mes achats en proviennent et que bien souvent vous vous réjouissez de leur modicité.
- Passe-le en salle des ventes.
- Nous y perdrions.
- Comment cela ?
- L’étude nous versera moins de soixante-pour-cent du prix final; sans parler de la plus-value.
- Ce serait déjà pas mal.
- Et à la moindre défaillance de l’expert, on se retrouvera au tiers du marché.

- Ou plutôt du prix que tu t’es mis en tête. Moi je vise la réalisation comme le disent si bien les notaires. Vendu, payé. Et hop ! Liquidé l’homme des profondeurs.
- Vous ne savez pas combien il a couté.
- Je ne veux pas le savoir.
- Je ne vous l’ai jamais dit ?
- Vise les chinois, mets-le chez les anglais.
- Ils ne prennent pas les ouvrages à moins de 2000.
- Tu l’as payé 4000 ; tout le liquide de ton héritage.
- Je vous ai dit ça ?
- Le bas de laine de ta maman.
- Mais en vous expliquant que c’était une erreur de jeunesse ; avant de vous connaitre, mon aimée.
- En m’assurant avoir fait un « coup » pour reprendre ton expression… un coup pour lequel les rosbifs ne donnent même pas la moitié.
- Et qu’attendre de l’ennemi héréditaire ?
- Propose-le à un libraire.
- Ils n’ont plus un rond.
- Mets-le en dépôt chez celui qui t’a vendu le du Choul.
- Ce n’est pas un libraire mais un bouquiniste.
- Quelle différence ?
- Il n’est pas membre du syndicat.

- Et alors ?
- L’argent sera bu avant qu’il ne nous revienne.
- Parce qu’au syndicat, ils ne boivent pas ?
- Ce serait contraire à leur éthique.
- La même éthique qui te fait repartir du Grand-Palais en chantant la Madelon ?
- Un simple exercice respiratoire…
- Libatoire, veux-tu dire. D’ailleurs tu jurais tes grands dieux t’être laissé entrainer.
- Est-ce ainsi que vous vous le représentez ?
- Que je l’ai enduré.

- Je n’en garde qu’un souvenir confus.
- Rien de surprenant, vu ton état.
- Vous pensez ?
- En tout cas, j’ai compris. Je vais m’occuper moi-même de ce Végèce.
- Vous toute seule ?
- Pour ne pas changer…"

A suivre

Ebayana et Bibliophilie, livres anciens en vente sur ebay: belles reliures, EO, livres à planches, éditions du 16ème au 20ème siècle et curiosités

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Amis Bibliophiles bonjour,

Voici une sélection de livres intéressants actuellement en vente sur eBay.

Vous pouvez en retrouver beaucoup plus sur http://encheresbibliophiles.fr/


En passant, j'ai ajouté de nouvelles catégories sur http://encheresbibliophiles.fr/, si vous aimez la philatélie, le militaria, la numismatique ou les antiquités en général, vous pourrez retrouver sur le site les objets de ces catégories toujours classés par critères: les plus suivis, les plus chers, les plus enchéris.



RARE LIVRE D’HEURES Vierge Marie Danses des Morts 1542 Thielman KERVER



1659 RABELAIS GARGANTUA & PANTAGRUEL RARE RELIURE AUX ARMES COMPLET EN 2 VOLUMES

LOUYS APHRODITE MAROQUIN DE GRUEL RARISSIME TIRAGE SUR JAPON 2/25 CURIOSA 1902

LA BIBLE DE MORTIER 214 FIGURES GRAVEES 5 CARTES PREMIER TIRAGE ANVERS 1700


RETIF DE LA BRETONNE LE PAYSAN PERVERTI SECONDE EDITION PLEIN VEAU D'EPOQUE 1776

EXCEPTIONNELLE RELIURE GALUCHAT !! HEURES NOUVELLES Theologie GRAVURES 1686 Rare



1824 MAROQUIN ROUGE ARMES ROYALES ALMANACH DU DEPARTEMENT DE L YONNE

RELIURE XVII EME PLEIN MAROQUIN RICHEMENT DÉCORÉ - 1645 - CICERON - AMSTERDAM




Marc Antoine MURET ++ Discours et Oraisons ++ 1625 ++ Professeur de MONTAIGNE !

FELICIEN ROPS ++ Voltaire, Zadig ++ 1893 ++ PLEIN MAROQUIN DOUBLé, in-4


MATTIOLI MATTHIOLUS MATTHIOLE Commentaires Médecine Plantes Animaux 1680

AUX ARMES ROYALES PLEIN MAROQUIN RELIURE A LA FANFARE 1727 SUPERBE ETAT!!



PORTEFEUILLE en MAROQUIN XVIIIe avec CALENDRIER A SYSTEME RARE EXEMPLAIRE

Heures d'Elisabeth SENAULT ++ Entièrement GRAVéeS ++ 1690 ++ PLEIN MAROQUIN


RELIURE MAROQUIN SIGNEE STROOBANTS MUSSET nouvelles N° 10 HOLLANDE 1909 LEMERRE

Richard STREIN + GENEALOGIES Romaines + 1559 + ESTIENNE ++ avec POESIE de BEZE



DU BELLAY ++ Les MEMOIRES ++ 1573 ++ Beau volume imprimé à PARIS ++

ALCHIMIE ++ GRAVURES sur BOIS ++ Les SECRETS de Piemontois ++ 1671 ++

H

Renaud de Beaune ou laa quête des éphémères* en 1588-1589 (* éphémère: petite publication, autrement appelé occasionnel)

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Amis Bibliophiles bonjour,
 
Le bénin lecteur connaît certainement l’archevêque de Bourges, Renaud de Beaune.
 
 
Armes de Renaud de Beaune qui a écartelé les armes de son père Guillaume et de sa mère Bonne Cotereau, écartelé au 1 et 4, de gueules à un chevron d’argent accompagné de 3 besants posés 2 et 1, au 2 et 3 d’argent à 3 lézards de sinople posés 2,1.
 
(Qu’on ne se méprenne pas, je ne viens pas ici faire de l’ombre à l’inestimable libraire de Tarascon qui s’emploie régulièrement, avec talent, à remettre à l’honneur des livres ou des auteurs édifiants et que je salue bien amicalement).
 Souvenez-vous :
Renaud de Beaune convainquit Henri IV que Paris vaut bien une messe (selon la légende)et reçut l’abjuration du roi à Saint-Denis le 25 juillet 1593.
 
Abjuration de Henri IV, évêque de Bourges en bas
 
Auparavant et depuis 1581, il était archevêque de Bourges. Doté, selon Pierre Bayle, d’une mémoire considérable et de grandes facultés d’éloquence, il nous a laissé nombre de plaquettes imprimées de ses discours aux éditions multiples : Oraison funèbre de la très-chrestienne , très illustre, très-constante, Marie royne d’Ecosse, morte pour la foy, le 18 febvrier, 1587 par la cruauté des Anglois heretiques, ennemys de Dieu”, 1588 ; Sermon funèbre prononcé aux obsèques de feu reverendissime et illustriss[ime] René Card. De Birague Chancellier de France le 6 décembre 1583. Paris, Gilles Beys ; Oraison funèbre faicte et prononcee....au service de Anne de Thou, femme de Philippe Hurault, vicomte de Cheverny 26 octobre 1584, Paris, Mamert Patisson, Oraison funèbre faicte aux obsèques de la Royne, mère du Roy, 1589, Pierre L'Huillier, Jamet Mettayer, ainsi que des ouvrages religieux : Decreta Concillii provincialis patriarchalis provinciae aquitanicae Biturigibus celebrati Mense, Anno Domini M.D. CXXXIIII” Paris Federicum Morellum 1586 ; Les C.L. Pseaumes de David latins & François, traduits par Mre Renaud de Beaune Archevesque de Bourges. Éditions 1587, 1595, 1612, 1613, 1639…
 

 
En 1588, aux États Généraux convoqués à Blois par le roi Henri III, il préside le clergé. Cette charge lui fait obligation de répondre au discours d’ouverture du roi.
La harangue faicte par le roy Henri troisième de France et de Pologne à l’ouverture des Trois Estats generaux de son royaume, en sa ville de Bloys, le seizième jour d’octobre 1588”à Paris, jouxte la copie imprimée par Philippe Morel, Jamet Mettayer & Pierre L’Huillier, 1588, in-12, 104 pages.
 
 
 
On trouve sous cette pagination avec une page de titre séparée les Actes de la seconde séance des Estats generaux de France tenus à Bloys le mardy 18 du mois d’octobre 1588 et la brève exhortation faite aux estats de ce royaume par monsieur l’archevêque de Bourges par commendement du Roy sur le serment solennel presté par sa majesté le mardi XVIIIejour d’octobre à l’assemblée des estats. Et encore la Requeste prononcée par Monsieur de Bourges aux trois estats assemblés au chasteau de Blois le jour de Ste Catherine 25 novembre 1588 et enfin la brève requeste faicte au Roy par Monseigneur l’archevêque de Bourges.
L’éditeur nous explique en préambule qu’il livre au lecteur les discours avant la fin des États.
 
En effet, un discours désavoué par Renaud de Beaune et parfois attribué à Jean de Caumontétait déjà paru, rapidement, pendant la tenue des Etats : La harangue et proposition faicte au Roy sur l’union de toute la noblesse Catholique de France présentée au Roy. Par Monsieur de Mande Archevesque de Bourges” André le Coq, 1588, in-12, 22 pages.
 
 
Renaud de Beaune avait été évêque de Mende en 1568. Ce texte paraît aussi chez Jehan Morin à Paris.
 
Le désaveu de cette pièce se trouve en avertissement de la Briefve Exhortation faicte aux Estats de ce royaume, par Monsieur l’Archevesque de Bourges, par commandement du Roy, sur le serment solennel presté par sa Majesté: & par luy requis de ses subietcts, pour l’entretenement de l’Edict d’Union, le mardi xviii d’octobre, 1588 après l’ouverture des Estats” A Lyon, Benoist Rigaud, sd [1588] in-12 14 pp.,
Ici en édition séparée.
 
Elle répond au discours du roi appelant à l’union des catholiques
 
 
Renaud de Beaune ne s’en tient pas là :
La harangue faicte par Monsieur l’Archevesque de Bourges, eslu & député par l’assemblée du Clergé vers le Roy, contenant la misère & calamité de son pauvre peuple. Prononcé à Blois devant sa Majesté, le vingt-cinquièsme Novembre, 1588.”à Troyes Jean Moreau, in-12 20 pp., L’édition collective ci-dessus porte un titre un peu différent (Requeste prononcée par Monsieur de Bourges…).
Ce texte se retrouve aussi sous le titre : La Harangue sur la diminution des tailles au soulagement du pauvre peuple, prononcée en l'assemblée des trois Estats, le 25 novembre 1588, par monsieur l'archevesque de Bourges1588, Paris M. Jouïn.
 
 
 
Puis, en décembre : Première remontrance faicte au Roy par M l’Archevêque de Bourges , au nom des Estats, pour le soulagement & descharges du peuple, de ce qui est accreu des tailles & impositions depuis les derniers Estats de Bloys, le samedi III Décembre 1588, A Bloys pour Jamet Mettayer, P. L’Huillier, 17 pages
Ce discours porte aussi le titre de seconde requeste faicte au roi
 
Henri III fait assassiner le duc de Guise le 23 décembre et son frère le Cardinal le 24.
Sa mère, Catherine de Médicis meurt le 5 janvier 1589.
 
Assassinat du cardinal de Guise, Le martyre des deux frères, 1589.
 
Renaud de Beaune intervient encore une fois :
Déclamation ou harangue faicte aux Estats tenus à Bloys. Par Monsieur l’Archevesque de Bourges, Patriarche, Primat d’Aquitaine, Président en l’Estat Ecclesiastique ausdicts Etats, le dimanche XV jour de janvier 1589"A Lyon par Jean Pillehotte 1589, in-12 69 pp
 
 
 
Les États se clôturent le lendemain seize janvier 1589, dans un climat menaçant d’effervescence de la Ligue, sur un échec complet.
 
 
Que faut-il retenir de tout cela me direz-vous ? Sans doute l’édition de ces discours, petites plaquettes vite composées et de peu de pages, demandant peu de matériel typographique était- elle lucrative pour les imprimeurs et libraires (Mettayer, L’Huillier,...) attachés à la cours à Paris, Tours et Blois. À Lyon, à Troyes, à Paris d’autres imprimeurs s’emparent des opuscules de leurs confrères et multiplient les éditions.
 
Voici l’occasion pour le bibliophile de vérifier éditions et rééditions, plagiats et copies non autorisées, fausses attributions, impressions collectives et impressions partagées. Plus d’un motif pour explorer les bibliothèques, dépouiller les catalogues et consulter les bibliographies. Le rêve, non ?
 
Lauverjat

La bibliophilie, un investissement de père de famille.

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Amis Bibliophiles bonsoir,
 
La négociation se poursuit, retrouvons nos époux, et le mari bibliophile, en pleine discussion
 
 
"- Mon tendre époux… Mon doux, mon tendre, mon merveilleux époux, j’ai une grande nouvelle à t’annoncer…
- Vous m’inquiétez.
- Ah, bon… Et si j’étais enceinte ?
- Vous n’y pensez pas ?
- Non je n’y pense pas… à moins de remonter aux vacances d’été.
- Je vous rappelle ma chère que l’été dernier, nous n’avons pas pu partir ensemble.
- Je sais ce que je dis.
- Que voulez-vous dire ?
- Qu’importe.
- Mais non, pas qu’importe.
- Perds cette habitude de toujours me contredire. Écoute plutôt.
- Je suis assis.
- J’ai gagné au loto.
- Nous avons gagné au loto ?
- Ecoute mieux : Je, Je-Je-Je - je ai - j’ai  gagné au Loto.
- Mais puisque nous faisons ticket commun.
- Oui monsieur, mais ce sont mes chiffres à moi qui ont gagné.
- C’est injuste.
- C’est la loi du nombre.
- Rappelez-vous nos promesses. Aujourd'hui plus qu'hier, moins que demain… et de toujours jouer l’un pour l’autre.
- Je ne savais pas ce qui m’attendait.
- Mais de quoi parlez-vous ?
- De gérer le pactole.
- Une bibliothèque digne de ce nom me suffirait.
- C’est bien ce que je craignais.
- Et que craignez-vous ? Nous sommes riches ma mie ! Riches ! Riches ! Riches ! Riiiiiiches !!! Enfin, le sommes-nous ?
- Oui, sans plus, Il s’agit de faire fructifier.
- Comptez sur moi, ma douce et tendre.
- Mais de quoi parles-tu ?
- De compter sur moi, ma sucrerie.
- De compter sur toi ?
- Mais comme toujours ma judicieuse. Et plus encore depuis l’instant précis ou mon savoir roule carrosse. Si je vous disais les occasions manquées à force de ne pas être riche... C’est ter-mi-né ! Entendez-vous ce joyeux trépidement ? C’est une gigue, mon entrechat ; ma connaissance qui gambille, une Visa Gold à chaque bras. Fini chopins et grasses révises ; si l’on achète aux enchères, ce sera à sec et contre moi !
- N’y compte pas.
- Je vous parle de livres, ma corne d’abondance, de livres et encore de livres ! Prenez mon cheval, gardez votre royaume, mais donnez-moi un livre. Car avec un seul livre, des royaumes, j’en bâtirai cent ; je vous en offrirai mille.
- Et moi Je te parle de bonifier nos avoirs...
- Justement mon Crésus, nous allons conjuguer l’avoir et le savoir. Avoir et Savoir  vous comprenez ? Nous allons thésauriser le génie humain ; humer ses encres, palper ses en-têtes, mirer ses filigranes et grâce à cette communion intime, l’inscrire à notre capital.
- D’assurer notre position sociale…
- Mais en danseuse qu’on va se le grimper, le Who’s Who ! Nous allons devenir des riches comme on en fait plus. Et nos terres à nous, ce seront des livres, des livres à perte de vue, jusqu’aux confins de l’horizon, jusqu’au delà de la courbure de la terre… et nos châteaux, des rayonnages s’élançant vers les étoiles. Ad Astra…
- Ad abruptum, vers les précipices.
- Mais non, ma montagne russe, rien ne coutera rien à personne. Ni à vous, ni à moi. Vous n’imaginez pas…
- Je n’imagine que trop.
- J’ai tout prévu. Deux bibliothèques, l’une finançant l’autre. Miscellanées de la collection M***. Un catalogue épais comme une muraille. Avec une préface, oui… une préface. D’un académicien, ce serait le moins. Imaginez…
- Non merci.
- Une stupéfiante culbute, ma bien-chanceuse ; l’ISF en triple saut tirebouchonné et vrillé. Je vais vous le surmultiplier votre Loto… Attendez-vous à des pluies de francs suisses, de roubles, de yuans. Ah oui, des averses de yuans entrecoupés de dollars de Hong-Kong. On va prendre l’argent dans les coffres de l’Empire céleste ; là ou il se trouve, là où ils n’arrivent plus à le compter. On va, je m’y engage, leur coller du Lamartine au prix du Qian-Long. On va les essorer, vous dis-je, les tondre, les plumer, les ratiboiser. Fini le Louis Vuitton, mon rouleau de printemps, on passe au Marius-Michel.
- Je m’attendais un peu à cela.
- Et moi, à pas moins de vous… Qu’avez-vous envisagé pour ma petite trésorerie ?
- Je l’ai doublée.
- Doublée ? Mais ce n’est rien !
- Ca me parait beaucoup au rythme ou tu entasses.
- Autant dire moins que rien.
- Tout de même ce n’est pas rien.
- Mais rien c’est comme zéro, on peut le doubler tant qu’on veut, ce sera toujours rien.
- Justement ce n’est pas tout.
- Une caisse noire ? Des fonds spéciaux ?
- Vu qu’après-tout, tu es mon mari…
- Le après-tout me sied très bien.
- … je suis condamnée à une certaine forme d’attachement, même quand il s’agit de tes livres.
- Je ne vous suis pas.
- J’ai investi dans tes rêves, mon ami. Imagine le plus grand cadeau que je puisse te faire…
- Ne vous dérangez pas pour moi.
- Et si tu me devais le fleuron de ta bibliothèque ?
- Ne me dites pas que vous avez acheté des livres.
- C’est pourtant ce que j’ai fait.
- Nom d’un chien !
- M’en crois-tu incapable ?
- ça doit être beau.
- D’ailleurs il ne s’agit pas de livres…
- Juste un seul ? Vous me rassurez. Apres tout, si on est riches, vous pouvez bien vous en payer un de temps à autre.
- … mais d’un rouleau, un bout de rouleau plus exactement.
- Un bout ? Mais qu’avez-vous fait du reste ?
- Un rouleau couvert d’une fine écriture …
- Les manuscrits de la mer morte… Vous ne les avez pas payés trop cher ?
- Quinze-pour-cent de nos gains
- C’est inouï, ils en sortent 10 par jour à Barbes… Et combien nous reste-t-il maintenant que nous sommes quinze-pour-cent plus pauvres ?
- 5 enveloppes.
- Mais de quoi parlez-vous à la fin ?
- Aux gagnants du premier rang, la Française Des Jeux offre plusieurs options. La première est de tout prendre d’un coup.
- et de partir sans demander son reste, ce que j’aurais fait en courant.
- Ou de n’en prendre qu’une partie et de bénéficier d’avantages spéciaux
- Mais bon sang, qu’est-ce qu’on a besoin d’avantages spéciaux ? On les a tous puisqu’on est riches !
- 5 enveloppes représentant chacune, quinze-pour-cent de nos gains.
Ils vous ont payé en liquide ? Surtout n’y touchez pas !
- Mais laisse-moi finir !
- Vous ne comprenez donc pas ? C’est de l’argent de ministre. Y’a rien de pire ! Dépensez-en 1 fifrelin et la brigade financière débarque dans l’instant. Vous voulez savoir à quoi il lui sert votre ticket gagnant, au ministre ? A faire des choix républicains. Démissionnerais-je…, démissionnerais-je pas ? Fini tout ça, il peut viser la présidence. Et vous savez comment il nous appelle ? Ses pigeons blanchisseurs qu’il nous appelle le ministre.
- Ne sois pas vulgaire
- Et quand vous serez fatiguée d’en tresser des guirlandes, il ne vous restera qu’à le bruler; même aux étrennes du facteur ça ne passera pas. Une tirelire pleine à ras-bord d’argent inutile, de l’argent qui ne sert rien… faut le faire ! Je me suis toujours demandé ce que voulait dire la chanson Riche et con à la fois… Ça me semblait contradictoire. Ben voila, maintenant je sais.
- Jeune et con à la fois…
- Pardon ?
- Je dis que dans la chanson de Brel, les paroles c’est jeune et non pas riche.
- Mais qu’est-ce qu’on en a à foutre, nom-de-dieu ?!?
- J’appelle ma mère !
- Allons, allons, ma bienveillante, ne me tourmentez pas plus que nécessaire. Je voulais juste attirer votre attention sur le fait que je n’y comprends rien.
- Le contraire m’aurait surpris.
- Qu’est-ce que c’est que ces enveloppes ? Et quid des 25% restant ?
- Au moins tu sais compter. Ils ont été mis à disposition sur un compte courant ; le mien en l’occurrence.
- Je croyais que mon agence était la plus proche.
- Tu n’es jamais content.
- Et ces enveloppes ?
- Des enveloppes à thème proposant un panel d’investissements diversifiés.
- Un panel ?
- Un panier.
- Je vois le genre.
- Il y en a une pour notre fils : Rayonnement technologique français.
- Français ? Vous rigolez ???
- Pas le moins du monde.
- Vous en avez fait l’acheteur historique d’une escadrille de Rafale.
- Tu me prends vraiment pour une cruche, j’ai choisi l’Airbus.
- C’est européen.
- Une pour notre fille.
- Je ne vous demande pas ce que c’est.
- Une pour moi.
- Ne me dites surtout rien.
- Une commune à chacun de nous. J’ai choisi une maison.
- Excellente idée, j’en connais une à visiter.
- Quand je dis j’ai choisi, je veux dire que c’est fait.
- je pensais avoir mon mot à dire.
- N’y pense plus.
- Mais vous m’avez prévu une bibliothèque ?
- Oui, une grande pièce.
- Une grande pièce, mais c’est tout petit.
- Ca suffira.
- Pas du tout !!! On va nous prendre pour des non-imposables. Il y a des convenances à respecter. Une grande pièce, ca fait pauvre.
- Justement c’est de convenances dont je te parle. Je veux que ma fille arrête de brandir ostensiblement sa tablette quand elle ramène des amies à la maison
- Elle m’a juré que c’était une liseuse.
- Et tu l’as crue ?
- C’est parfois surprenant comme elle vous imite.
- Écoute-moi bien… Je veux que la bibliothèque de cette maison soit un lieu ouvert, lumineux, aéré. Surtout a-é-ré... Je veux pouvoir la faire visiter autrement qu’avec un sourire d’excuse et en ouvrant toutes les fenêtres.
- Pas question d’y laisser entrer n’importe qui
- Je te parle de nos proches
- C’est bien ce que je dis.
- D’ailleurs ta bibliothèque sera bien plus grande que tu ne le crois
- J’aurais des annexes, une réserve… un enfer peut-être ?
- Tu seras dans les musées.
- Forcement puisque je suis riche. Et vous savez comment ca va se passer ? En beaux et bons livres qu’il m’offrira de payer, le fisc. Offrir : le mot est juste… Mes livres ! A leurs prix à eux ! Tous complices, mon aveuglée ; le conservateur, le percepteur, le douanier. Ils s’acoquinent dans des séminaires pour mieux me dépouiller, des synodes, des conclaves … Et les soirs de Sabbat, ils chevauchent des balais ensemble. La seule chose qu’ils me laisseront, ce sont les yeux pour pleurer.
- Tu échapperas à l’impôt.
- Et comment ? Il faudrait un miracle et le seul serait qu’ils m’oublient.
- Le miracle de l’enveloppe mauve.
- Mauve ?
- Celle qui t’est destinée : Rayonnement culturel français.
- Et la FDJ a trouvé à investir là-dedans ?
- Parfaitement
- Ah, ils sont trop forts ! Vous avez-vu leur dernier jeu consistant à piquer une figurine avec des épingles ?
- Non.
- Ca marche par paire. Par exemple si vous trouvez la même somme dans les yeux, vous gagnez. Mais ce n’est pas ce qui rapporte le plus.
- Ah oui ?
- Ne me dites pas qu’ils ont épongé mes quinze-pour-cent ?
- Je t’ai acheté la Joconde
- La Joconde ? Mais elle n’est pas à vendre !
- une Joconde pour bibliophile.
- Je serais curieux de voir ce que vous vous êtes laissée refiler.
- Tu te rappelles ces affiches dans le métro ?
- Vous voulez parler de l’expo sur le Marquis de Sade ? Je suis comme vous, je préfère ne pas y aller.
- Nous irons désormais ;  et plutôt deux fois qu’une.
- Sans moi, si vous voulez bien. D’ailleurs je crois qu'elle est bientôt terminée.
- Nous avons le temps, c’est nous les propriétaires.
- De l’expo ?
- Du rouleau.
- Encore ce rouleau ? C’est une obsession !
- Le rouleau qui était sur l’affiche.
- Le rouleau des 120 journées de Sodome ?
- Exactement.
- Vous vous êtes fait rouler.
- Penses-tu !
- Mais enfin c’est notre histoire, mon oublieuse, notre culture qui illumine la planète ; Malraux cité dans les pagodes, Hugo récité dans les izbas. Ca ne s’achète pas, ca ne se vend pas ! C’est à tout le monde, à vous, à moi, à eux, à chacun des enfants de France. C’est au peuple, ma carmagnole, ça nous appartient depuis toujours. Comprenez bien, vous n’en serez jamais plus propriétaire que vous ne l’êtes déjà.
- C’est pourtant à toi.
- Alors montrez-le-moi.
- Tu n’en détiens qu’une partie, douze-pour-cent exactement
- Mes quinze-pour cent sont dans ces douze-pour-cent ?
- Yes, sir !
- Et ces douze-pour-cent sont où ?
- Je te l’ai dit : dans un musée.
- Dans un musée ? Mais vous êtes complètement inconsciente ! Ils ne savent pas ce que c’est que l’argent dans un musée ; on leur interdit d’y toucher. Quand ils sont tout petits, on raconte aux conservateurs que l’argent c’est une bête féroce qui mange les mains des enfants. Vous voulez qu’ils fassent comment sans les mains, pour nous le polir le retour sur investissement ? Par la force du regard ? Même un ministre n’y arriverait pas.
- Au moins les musées sont honnêtes.
- Vous rêvez, mon abusée, Ils vont faire comme les manouches, garder la marchandise et l’argent. Les deux à la fois.  Vous savez en quoi ils vont les transformer nos quinze-pour cent ? En frais de fonctionnement ; on va leur payer l’EDF.
- C’est un musée privé.
- Une exploitation familiale ?
- Pas du tout. C’est un musée ayant pignon sur rue avec des bibliothécaires, des experts et un pool de conseillers financiers.
- Des conseillers financiers dans un musée ? Vous délirez.
- Si je te dis qu’il est consacré à ce que tu fais passer avant moi, je délire encore ?
- Mais enfin, mon absolue…
- Et du friendly, mon ami, du VIP bienveillant, long comme le bras. Entraine-toi à les appeler par leurs prénoms.
- Tout de même, qu’est-ce qu’ils vont en faire de mes quinze-pour-cent ?
- Huit-pour-cent par an
- Huit ? Ils se sont carrément foutus de votre gueule.
- Sur cinq ans.
- Vous me rassurez, dans cinq ans on se casse avec ce qu’ils auront bien voulu nous laisser. S’ils nous en ont laissé.
- On restera ! Modèle économique à l’appui.
- Mais quel foutu modèle économique peuvent-ils bien appliquer à des livres anciens ???
- Ne sois pas grossier."

A suivre…
 
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